Betony Vernon : Parade charnelle
Le 27/04/2009
Fines lèvres carmin assorties aux ongles, casque roux long et lisse, corps enveloppé de cuir noir pour un effet peau sur peau, jambes interminables cernées de bas couture. Betony Vernon est un loup pour l’homme. Reste à planter le décorum : un boudoir parisien capitonné de satin rose, où la porte s’ouvre uniquement sur rendez vous, et où les bruits de pas disparaissent comme les inhibitions des visiteurs. Ici l’eau est délivrée dans un verre à pied noir. C’est l’une des ultimes fois que Betony reçoit en ces lieux, car en février prochain elle fera salon dans un grand appartement XVIIe avec un jardin clos. Ses fonctions à l’intérieur de cette zone franche ? On pourrait dire, non sans emphase, Grande Prêtresse de l’Amour.
Les bijoux de l’amour
Cette ancienne créatrice d’accessoires de mode, d’origine anglo-américaine, « élevée par très peu de guides adultes, ce qui m’a laissé très libre » s’est investie d’une haute mission le 11 septembre 2001 : propager l’amour, voire mieux, l’enseigner. L’amour, la sexualité, cette rousse affolante maîtrise ces domaines comme une scientifique. Un de ses fantasmes, elle qui étudia la sexologie, étant de s’entendre appeler un jour docteur Vernon. Betony Vernon a tout d’abord crée une ligne de « sex jewels » au nom évocateur « Paradise Found ». Titre d’un livre également, dont elle est l’auteur, à paraître fin 2008. Des bijoux sexuels donc, en or blanc, jaune, rose, argent, pierres précieuses, sur commande uniquement. « Les bijoux sont les objets les plus intimes, ils mêlent sentiments, vie, histoire, touchent au corps et au cœur. » Des bagues qui au demeurant semblent presque anodines, mais qui se révèlent vite comme des brûloirs, précieux alliés pour caresses sophistiquées comme cette bague au multiples perles, ou plus chastes comme cette autre bague en immenses plumes d’autruches car selon elle : « Le sexe n’est pas seulement génital et il n’y a pas un sens plus important qu’un autre. Il faut stimuler tous les sens, apprendre à goûter son amour. » Ces bagues précieuses oscillent entre 200 et 10 000 euros. Miss Vernon souhaite que ces clients, souvent célèbres à l’instar d’Angelina Jolie, sortent de son antre « armés pour le plaisir ». Les cockrings peuvent ici se porter, sans avoir l’air d’y toucher, en ceinture, les godemichés en argent massif se muent en flacon d’huile de massage. Dans son « boudoir box » (contenant des objets cultes en 10 exemplaires) se niche tout ce qui permet selon cette dernière « de stimuler tous les sens, de faire mieux que ce qu’on fait déjà avec les mains, aller plus fort, plus longtemps. »
La pratique du plaisir
Cette femme de feu enseigne également à des clients cooptés les vertiges de l’amour « Je prends le point de vue du plaisir, pas de la névrose ni de la maladie. Je demande toujours aux femmes lors de mes leçons de venir avec leur partenaire, sinon l’homme se sent écrasé. De toute façon il n’existe pas de natural born lover. » Le corps sculptural de cette créature qui mesure 1m 80 fût souvent photographié, « Mon corps est devenu mon laboratoire grâce à mes partenaires, mes amis. Je suis une esthète, je fais très attention à moi, je suis végétarienne depuis 25 ans, c’est important d’être bien dans son corps pour avoir confiance en soi et en l’autre. » Ses travaux pratiques Betony les prise tendance SM, car on l’avait compris, elle fait partie des maîtresses femmes. « Sans échange de fluides, on peut pratiquer le sexe sens risque ». Cette grande prêcheuse du safe sexe, ne juge rien de plus érotique qu’un test HIV fait avec son partenaire, et demeure ulcérée par la société dans laquelle nous vivons. « On n’a jamais eu une accessibilité telle sur l’image sexuelle, avec un tel manque de clarté et d’initiative. On a désormais une vision phallocrate de la performance sexuelle, initiée par la pornographie. On met de côté le plaisir féminin, on oublie les lubrifiants, les préliminaires. On montre seulement des grosses poitrines et des grosses bites. Des gens qui hurlent dans la frigidité. L’art d’aimer reste élitiste. »
Le temps du plaisir
A l’avenir, cette fan de Vivienne Westwood, qui réalise aussi ses propres vêtements sur mesure, se verrait bien lancer une ligne de lingerie et de vêtements. En attendant, à partir de janvier, elle dispensera ses conseils sur, par exemple, la masturbation et le sexe oral « Les gens pensent encore que c’est sans risque », pour la télé italienne, par le biais de sept chroniques intitulées « Boudoir » dans l’émission Loveline sur MTV. Betony est très concernée et très inquiète pour l’avenir de la planète (bien qu’elle avoue honteusement adorer le cuir), ne désire pas d’enfant « Je suis assez catastrophiste, la planète est très malade. Je ne veux pas faire des bébés dans ce monde. Et je préfère l’exemple de la femme moderne, une femme qui n’a pas besoin de faire un enfant pour garder un homme et avoir un toit sur sa tête. En plus je fais déjà la maman pour beaucoup de monde », dit-elle en riant. Cette femme amoureuse avoue se sentir nerveuse quand elle ne fait pas l’amour, « Les névroses viennent souvent d’un problème sexuel. Bien faire l’amour est une panacée. Dans l’histoire de l’homme on n’a jamais été aussi stressé, il nous manque le silence, l’espace. On rentre dans la paranoïa, la maladie, il faut faire un effort pour donner en priorité du temps à l’amour. »
[gris]Julie Boukobza[/gris]