Rouge
Le 15/08/2019
Sur la table en bois brute, une épaisse planche à découper, d’un bois plus clair, concave à force d’usage, lacérée par les coups de couteaux lancinants de la matrone qui règne sur cette cuisine depuis de longues années avec la même ferveur. Les couteaux eux-mêmes sont fatigués, effilés, creusés, les lames sont devenues fines, fragiles, pointues, et leurs manches sont délavés, secs, mats, posés négligemment sur la table. Il y a des sacs en kraft qui s’empilent à droite, des fanes dépassent, des odeurs de d’oignons également.
Ces grandes cuisines de campagne racontent des histoires anciennes de femmes pour qui la cuisine était un refuge, elles y faisaient passer leurs frustrations. C’est ce que je me raconte en m’approchant de la table. Il me semble que tout la libido comprimée des femmes se compensait par une approche sensuelle et parfois violente aux aliments : une façon de pétrir la pâte à pain, ou de couper les carottes …
Le jour commence à décliner, la lumière d’été est encore chaude, dorée, mais ici elle pénètre peu, il faudrait allumer la lumière pour préparer les légumes, mais ce n’est pas mon intention.
Je suis nue sous une ample robe longue, les pieds rafraichis par les tomettes d’un rouge sombre et la froideur qui monte le long de mes jambes échauffes mes pensées, sans idée précise en tête.
J’ouvre le frigo pour voir si les restes d’un plat que je mangerai avec les doigts ne suffiraient pas à combler ma fantaisie lascive. Mon impulsion freine à la vue de cinq ou six poivrons rouges, crus, sur l’étagère centrale, posés dans une assiette de porcelaine blanche, dont un est amputé de moitié. Je me penche vers lui et un monde s’ouvre à moi.
Je le retire de l’assiette, le pose sur la planche à découper.
Je retourne une vieille chaise en bois, pour m’asseoir face au dossier, poser mon menton sur le rebord et observer cette carcasse de légume qui n’a pas encore été épépinée. A l’intérieur, les chairs comestibles maillent des tons de vermillons et de grenat, comme un muscle ensanglanté. La pulpe qui entoure le placenta et porte les graines semble d’une fragilité aérienne mais elle se corse en remontant vers la tige, le triangle mousseux à l’intérieur se tend, il se durcit au contact de son enveloppe verte. Une muqueuse humide traverse le fruit, voile une cavité devenue sombre. Tout autour, ce corps vernis ondule, il se tortille de plaisir.
Je ferme les yeux pour imaginer que j’introduis un doigt sur cette muqueuse, lequel glisse dans la cavité sombre, chaude, moelleuse, et plus mon doigt la farfouille, plus elle devient humide, voir même indécemment liquide.
Tu aimes ça, hein, petite pute ?
Mais oui ! oui, oui, oui !
Encore.
Et toi si habile, qui profite de ma position indécente de botaniste lubrique, de mes fesses retroussées, tu as glissé ta bite sauvage dans mon cul trempé et voilà que je jouis.
XL