Doux dedans
Le 16/12/2009
J’avance sur la plage, le regard tendu vers l’horizon. Loin des zones urbaines où les regards des hommes me transpercent au-delà des tissus, comme si je n’avais pas de culotte. Leurs respirations sur ma nuque, les humeurs du cannabis, leurs coups de reins contre moi adossée à la porte close que mon dos frappe. Ils me baisent. Sans voir les mots que j’écrivais enfant enveloppée dans le son délicat de la plume contre la feuille.
Puis, je me suis levée pour me détourner des klaxons de la ville tumultueuse. A genoux au milieu des papiers, je cherchais des musiques pour m’accompagner dans l’écriture. Un peu au hasard, légère, les cuisses entrouvertes sur cette chaise qui va finir par tomber tant je la maltraite, tant je danse dessus en tapant sur mon clavier, j’appuyai sur la touche play : ta musique comme l’espoir d’un clitoris lavé des anciennes blessures et là, vinrent la rondeur des violons, le sucré velouté de ta guitare qui m’enrobèrent comme la joie que j’avais enfant quand je dessinais des lettres sur le sable. Je me suis levée portée par tes accords qui berçaient mon corps comme contenu dans un hamac. Je succombai avant même de transpirer.
Ta voix qui fait que je débranche des éclats métalliques citadins, qui fait que je marche, qui fait que je ramasse ma robe pour qu’elle ne traîne pas dans la pisse des chiens. Avant que ta mélodie me prenne, j’avais couru sur le bitume, la nuit tard avec des paquets de cigarettes éventrés dans mon manteau. Poursuivie, je m’étais inscrite au club de boxe du commissariat. Je descendais dans le sous-sol où, silencieuse, je tapais le sac.
La plage est déserte. La plage où tes violons m’ont guidée. La plage où tu avances vers moi. Beau comme le sucre au bout des doigts qui ont trempé dans le miel. Mes poings serrés, je tremble. Tu t’approches si lentement que je sens à peine ta présence. Tu fermes les yeux. Je frémis de ta patience, je ne la connais pas. Je ne connais que le tap tap des gants de boxe. Tes lèvres à quelques centimètres de ma peau, j’inspire. L’air à flots dans mes narines. Tes gestes sont lents comme dans de l’eau, les violons posés sur l’assurance de la basse m’embarquent. Tu es grand, tu es brun, tu as des cernes sous les yeux, tu as des millions dans la poche. Tes lèvres se posent sous ma clavicule. J’ouvre la main, je l’approche de ton visage. Lentement, lentement. Tu m’inondes de silence, tu m’entraînes dans tes rythmes d’ailleurs, tu saisis ta guitare comme tu vas saisir mon corps. Elles te veulent toutes, elles bavent sur leur oreiller. Ton visage sur les affiches dans le métro, en quatre mètres par trois, je l’effleure pour que mes doigts déclenchent le plus délicat des orgasmes. Tu éclates de rire, je cours, pieds nus dans le sable. Le temps de ta lenteur à m’attraper. Avec des plumes, tu me chopes par-derrière pendant que ta voix qui les fait mouiller de la tête au pied me chuchote ce qui ne peut pas se dire. Je souris, tu as chaud. Tes lèvres s’approchent des miennes, je ne reconnais rien de ce que j’ai connu. Tu acceptes ma faim dans tes mains, tu as ce visage de petit enfant. Comme si tu étais tendre. Tu me prends contre toi en baissant les paupières, ta main s’infiltre sous mes tissus. Est-ce que tu l’entends, la mer ? Ton regard se dilue comme je ne peux pas imaginer qu’il est celui d’un garçon. Immobile sous le ciel ouvert, l’océan tout près, je prends ton bassin, nos harmonies s’amplifient. Je vois le plaisir t’inonder quand mes poignets t’effleurent. Là où je vais. En toi.
Je m’abandonne à ta pudeur. Où tu me touches, je n’ai que des plaies. Toi suspendu au-dessus de la bretelle de ma robe. Elle tombe sous ton pouce, de mon épaule. Tu plonges ; c’est ma peau nue désormais où tu voyages. Tu m’effeuilles en me dévorant de tes baisers, avec ta petite langue rose. La mienne t’ose, entier, millimètre par millimètre. Tu capitules sous ma bouche qui te lèche. A peine. Tu divagues sur le sable. Entre les cuisses, doux entre mes cuisses. Accueillir dans mon moelleux la dureté de ton sexe d’homme. Comme les mots que j’écrivais sur le sol dans l’enfance, les mots que je voulais qu’on lise comme je t’entends maintenant. « Viens », tu viens en moi, chargé à bloc de douceur. Elle gonfle d’un sang sirupeux ton sexe qui me pénètre sans heurt. Tout se lisse, tout glisse, tout s’affine, rien ne se déchire, tout se comble. Tout en arrêt. Ta voix sur laquelle elles se touchent dans des salles de concert, avec leur Ipod dans des soirs d’hiver, vient à mon oreille : « Je ne te fais pas mal ? » Tu penches ta tête contre la mienne. C’est doux dedans. Pour la première fois.
[gris]Marie D.[/gris]
Commentaires (11)
Cette histoire en bord de mer, c’est beau comme du Rohmer...
C’est très bien écrit.
C’est érotique et poétique à la fois.
Il faut absolument que j’écoute dans mon I-Pod, Benjamin Biolet me sussurer ces mots cochonnets tout au fond du creux du pli du recoin de mon oreille...
c’est vraiment bien écrit
c’est dépouillé
c’est haletant
c’est musical
c’est très sensuel
c’est cru ...avec poésie
c’est comme le désir qu’on nourrit sans cesse
Ce texte c’est très beau et précieux.Un maximum d’émotion pour une chose belle qu’on à tendance a oublier aujourd’hui : L’AMOUR.
L’enfance ,la mer et la douceur d’un homme...merci pour ce texte
on aimerait y étre.....
ouah ! j’adore, ça me fait frissonner
que de douleur avant cette douceur ! apparemment ça fait mal encore, trop mal pour être érotisant !
c’est magnifique. Toutes les femmes rêvent de moments identiques.
pour cela il faut se dévêtir de tous les tabous, et de tous les costumes qu’on nous a endossés.
Léa
Mon coeur bat vite en nostalgia. Souvenirs d’un amour antérieur. Tes mots ... me touchent.
: je vois que mon commentaire, un peu crqiuite sur la grande re9forme de l’Education nationale, a disparu en meame temps que ton premier post of9 tu osais appeler un chat un chat.Je pense que cette mesure d’hygie8ne publique (ne parlons pas de censure , nous ne sommes pas en Chine, quand meame, et le prix Nobel a de9je0 e9te9 attribue9 !) e9tait ne9cessaire.Tes mots ont e9videmment de9passe9 ta pense9e, reconnais-le des fois on en perd le contrf4le, il n’existe malheureusement pas encore de radars mentaux et ta deuxie8me version, si elle reste publie9e quelques minutes encore, est nettement plus polie et respectueuse que ton premier jet.Concernant mon commentaire d’origine, dans lequel je soulignais (ce que tout le monde sait) que L.C., en charge du ministe8re de l’Education nationale, et porte-parole du gouvernement, posse9dait un cursus professionnel des plus adapte9s concernant son poste actuel, dans lequel il devait faire preuve e0 la fois d’une science approfondie du marketing et des ressources humaines , acquises chez un parfumeur qui fait la renomme9e de la France jusque dans de lointaines contre9es.J aurais dfb e9galement, sans aucun doute, encenser plus nettement les formidables re9formes en cours dans le secteur e9ducatif : augmentation permanente du nombre des profs, multiplication du budget par dix, cre9ation d’IUFM en pagaille pour encadrer se9rieusement la formation des profs, ame9lioration des disciplines enseigne9es dans les lyce9es et colle8ges, ouverture vers les arts, etc.Je reconnais avoir peache9 par trop de discre9tion et pas assez d’empressement face au paysage formidable mis en place comme un de9cor de the9e2tre brillant de mille feux par L.C., aide9 par toute la hie9rarchie qui respecte sa de9marche volontariste et audacieuse. On le dit meame promis e0 un avenir politique encore plus resplendissant !J’espe8re simplement que ce commentaire vivra , lui aussi, quelques minutes, sinon je n’aurais plus qu’e0 aller me faire fusiller sur la place Tien-An-Men.