La lecture
Le 12/04/2009
Je me suis couché avant elle et je lis. Elle vient me rejoindre sur le lit mais elle ne s’est pas glissée sous le drap. Il fait un peu chaud et l’air est si doux qu’on peut presque dormir sans rien. Ce soir elle a enfilé cette petite nuisette courte en satin gris qu’elle ne porte pas souvent parce qu’elle dit qu’elle lui tient trop chaud sous la couette. Ça doit être pour cela qu’elle s’est étendue au dessus du drap. En cette nuit caniculaire une fine lingerie suffira. Elle s’adosse à son oreiller, à demi allongée à mes cotés. A sa place. Elle chausse ses lunettes et ouvre le livre qu’elle vient d’attraper sur sa table de chevet sans faire attention à moi.
Immobile à coté d’elle je la regarde en coin par-dessus mon bouquin et une curiosité s’éveille sur le sens de cette nuisette ce soir. Je me prends à rêver qu’il s’agit d’un message à mon intention, les femmes ont parfois de ces façons de nous manifester leurs désirs !… Ce déshabillé inhabituel attire mon attention et vient exciter fortement celui de nos cinq sens qui s’appelle vision. Il me prend une envie de voir. D’embrasser du regard cette nuisette et le corps qu’elle caresse de son tissu brillant. Elle a replié ses belles jambes, les deux pieds enfoncés bien à plat dans le matelas, ses genoux fins pointés vers le ciel. Elle a posé son livre sur la nuisette à hauteur du nombril et calé la tranche entre ses jambes contre ses cuisses légèrement ouvertes. Elle se plonge dans sa lecture, et m’oublie tout à fait. J’essaye aussi de retourner à mes pages mais je ne cesse de m’interroger sur ce que cache le livre et cette nuisette envoûtante que les cuisses relevées ont remonté jusqu’à l’aine. Mon regard ne cesse d’effectuer des détours dans cette direction. Je ne porte qu’un caleçon et mon torse est nu. Elle n’est couverte qu’en haut. Je me plais à considérer cette complémentarité vestimentaire comme un signe de notre fusion, de notre adéquation. Elle en bas et moi en haut nous ne formons qu’un seul corps. Je suis ému à cette idée. Alors j’ai envie de vérifier, de savoir si d’autres tissus, dessous, viennent ternir ce délicieux tableau. Je veux savoir si le sexe est à l’air libre sous la nuisette comme mon torse est nu au-dessus de mon caleçon. Mes yeux se tordent pour deviner ce que dissimule l’opacité du livre qui gêne ma contemplation. Pour occulter cette question qui me taraude, je me concentre sur le galbe harmonieux des cuisses à la peau luisante et veloutée. Je ne veux pas gêner la lecture et je m’efforce de me repaître de ce seul spectacle. Mais cette image en appelle une autre qui devient de plus en plus obsédante. Je veux voir.
Le vertige me prend de la regarder comme un voleur, sans déranger. De lui dérober le tableau de sa nudité, de sa féminité, de m’approprier son mystère, d’en faire frémir ma chair, à son insu. Déjà ma peau frissonne à cette pensée. Alors je me coule au pied du lit comme un serpent. Je ferme mes yeux et je remonte lentement sur le drap face à elle. Je rampe, les yeux fermés, vers son entrejambe en plein dans ma ligne de mire. Je m’étale de tout mon long sur le drap chaud. Je m’imagine aventurier explorateur de terres inconnues. Je n’ose ouvrir les yeux dans l’angoisse de ce que je vais découvrir. Je m’amuse à me faire peur. Il faut, oui, il faut qu’elle soit nue. Dans l’enthousiasme exaltant qui me prend, je ne pourrais souffrir une déception. Je me prépare. Je me lance. J’ouvre les yeux et là je m’éblouis, je trouve ma récompense. Devant le livre ouvert qui cache complètement le haut de son corps et son visage absorbé par sa lecture je découvre son sexe offert, complètement dénudé, posé tendrement entre deux coussinets de fesses écrasées par l’appui des deux jambes repliées. Le menton sur mes mains croisées sur le lit, je détaille l’ensemble avec adoration. Je prends toute la mesure de la fente immense qui prend naissance sous mes yeux au plus bas, dans les profondeurs des grandes vallées intimes ; qui remonte jusqu’au sommet d’une colline olympienne pour se perdre dans des nuées mousseuses et foisonnantes ; qui s’entrouvre sur l’orifice paisible dont la peau fine et rose émerge, gourmande et transparente, comme un sucre d’orge dans du papier glacé. Ça m’émerveille et ça me fait bander.
Ma lectrice impassible n’entend rien à ce manège. Ou bien elle fait semblant, la coquine, car il me semble qu’imperceptiblement elle a laissé retomber ses cuisses un peu plus de chaque côté. Une manœuvre discrète pour mieux caler son livre, mais qui m’offre un meilleur angle de vue et un plus parfait étourdissement. Je regarde, je vois, et cette vision dérobée m’enivre d’une joie intense, d’un plaisir insensé. Je joue à faire semblant de découvrir son sexe pour la première fois, comme si j’avais quinze ans. Je voudrais photographier, filmer ce sexe ouvert pour le faire mien, pour le conserver et l’admirer quand bon me semble, comme un imposteur qui vient subtiliser un trésor bien gardé, un violeur de secrets, un voyou voleur, un voyeur, dissimulé derrière une lecture comme derrière le trou d’une serrure. J’aime cette imposture. Ce plaisir que je prends sans l’avoir demandé. Je me plais à imaginer que je n’y suis pas autorisé.
La fente s’anime doucement se fait brillante, luisante, il vient y perler comme des gouttes de rosée. La lecture, plus haut, n’est peut-être pas si attentive qu’il y parait.
Je demande pour vérifier :
Il est bien ce livre ?
Hmm-hmm.
Peu m’importe la réponse, je ne veux pas voir son visage, son sexe me suffit, m’occupe tout entier.
Fais-moi la lecture s’il te plait.
Elle dit les phrases pour raconter l’histoire pendant que je me rapproche de sa vulve qui suinte. Je l’enveloppe de mon souffle chaud pour en attiser le foyer. Je souffle sur les braises que je suis en train d’allumer. Elle lit à haute voix tandis que je caresse de mes joues l’intérieur de ses cuisses ouvertes et ma bouche se rapproche de plus en plus près de son centre névralgique dont j’observe les réactions. En haut de la fente, son bonbon rose gonflé de sève apparaît, de plus en plus volumineux. Déjà j’ai envie de le croquer. Je le regarde seulement, les yeux embués à l’idée du plaisir qu’il sait générer. Ma lectrice déclame son texte d’une diction plus automatique. Pour jouer à l’exciter je passe ma langue d’une de ses cuisses à l’autre, effleurant au passage la fente et les renflements qui la bordent, bombés par le désir qu’elle se retient de manifester. Elle a de plus en plus de mal à suivre sa lecture. Le rythme de sa voix me dicte la montée de son émoi que je ne veux pas m’empresser de satisfaire. Je lèche les renflements de ses grandes lèvres de haut en bas, d’un coté, puis de l’autre, de mes deux doigts je les écarte un peu pour faire rentrer de l’air et j’attends.
Ma lectrice s’impatiente, son cul mouillé se met à vivre, et ses hanches opèrent à son bassin un léger mouvement de va et vient, de gauche à droite. Son corps s’est affaissé un peu plus vers l’arrière. Elle lit. J’aime entendre sa voix qui s’essouffle sous la pression de l’attente que je lui inflige. « Continue », lui dis-je. « C’est bien, continue comme ça ». Ce détachement, cette différenciation du corps et de l’esprit m’excitent épouvantablement, je joue avec un sexe sans âme que j’explore pour moi tout seul. Je me sens libre d’en jouer, d’en jouir, de l’enflammer à ma guise. Je suis le maître de son plaisir. Elle n’existe plus, elle n’est qu’une machine à lire, une machine que je vais faire jouir quand je le déciderai, pour mon propre plaisir. Je pose entre ses mots des baisers différents sur son sexe brûlant, des baisers furtifs, des chauds, des durs, des tendres, des mouillés, de plus en plus appuyés. Elle ne sait où mes lèvres vont se poser, la pincer, l’aspirer. Elle pousse des petits cris mais s’efforce de poursuivre sa lecture. Je voudrais que l’histoire ne s’arrête jamais, comme dans les mille et une nuits. Je voudrais rester là, lové entre ses cuisses et oublier que j’existe. Mais tout plaisir appelle un aboutissement sans quoi il ne demeure pas plaisir longtemps.
Maintenant la seule vision de son sexe en érection ne me suffit plus. J’ai besoin d’y gouter au plus profond, de m’y plonger, de m’y rassasier. La voix de ma lectrice se fait plus saccadée. J’enfourne alors mon visage d’un coup en plein cœur de son con et l’embrasse tout entier comme pour la dévorer. Je la suce sans relâche, je roule des pelles à son sexe en faisant tourner ma langue partout. Le livre est retombé sur la nuisette au-dessus de son ventre. Ma lectrice se tord et râle sous les décharges imprimées à son clitoris que je travaille maintenant de ma bouche et de mes doigts. Elle serre ses jambes croisées autour de mon cou pour m’enfoncer davantage. Je suis parti, perdu, éperdu dans mon paradis. Le seul mot qu’elle parvient maintenant à prononcer est : Encore !
Cecily Beldecadis