Sylvain Mimoun

Le 21/04/2009

Le Dr Sylvain Mimoun, gynécologue, andrologue et psychosomaticien est également chroniqueur radio et télé. Le nouveau Petit Larousse de la Sexualité a été rédigé sous sa direction. Il s’est entouré de nombreux collaborateurs spécialistes afin de mener à bien ce projet (médecins, sexologues, psychiatres, sociologues, juristes, journalistes, lexicographes...). Retour sur un dictionnaire qui a attendu 2007 pour être enfin créé !

Qui a eu l’idée de ce dictionnaire ? Vous ou Larousse ?

L’idée est venue de Larousse et ils me l’ont proposé. Différents éditeurs m’avaient déjà proposé de faire un dictionnaire de la sexualité, mais j’avais répondu non, car écrire des livres et écrire un dictionnaire, ce n’est pas le même métier. Mais dans ce cas-là, je savais que Larousse savait faire des dictionnaires, donc leur notoriété m’a rassuré ! Ils voulaient un dictionnaire exhaustif, culturel, clair mais aussi ludique avec des mots courants. Ce projet aura finalement mis 2 ans et demi à naître grâce à une cinquantaine de collaborateurs et finalement 1 200 mots (on était partis de 3000 !). Le dictionnaire devait faire 700 pages. Il en fait 1000. On nous a laissé le champ libre pour le mener à bien.

Il n’y avait rien de satisfaisant pour vous dans ce domaine ?

Non, dans le genre dictionnaire, il n’y avait rien. Mais associer Larousse et sexualité me plaisait bien… Bousculer un peu la Grande Dame Larousse, c’était tentant ! Larousse, c’est culturel, c’est sérieux. La sexualité aussi peut être sérieuse, mais c’est tellement mieux quand elle est ludique !

Comment avez-vous procédé pour choisir les différents auteurs des articles ?

J’ai proposé à Larousse pas mal de noms de spécialistes que je connaissais et on a dispatché les termes suivant leurs spécialités à tous. Le choix des termes a été très très long, mais une fois cette étape surmontée, ça s’est plutôt bien déroulé.

Pensez-vous qu’une sexualité épanouie passe d’abord par la connaissance ?

Pas obligatoirement. L’outil de connaissance sert surtout quand on a un problème. Car quand on a un problème, on peut avoir des réponses à portée de main et on peut identifier ce problème. Le savoir et le reconnaître est le 1er pas vers une recherche de solution. Car si on fait comme s’il n’existait pas, le problème peut s’installer de manière insidieuse. Mais ce dictionnaire peut également être un livre de jeu. On peut passer avec lui d’amusantes, et peut-être stimulantes ?, longues soirées d’hiver devant la cheminée. Si on s’en sert en étant complices, on arrivera forcément au rire et le rire, quand on se connaît bien, pousse généralement dans les bras l’un de l’autre.

La 1ère partie iconographie est le sexe dans l’art et au cinéma. C’est important pour vous la représentation du sexe dans l’art ?

C’est extrêmement important. Les artistes ont du mal à vivre mais on vit avec l’art. La vie est beaucoup moins triste avec l’art ! Le culturel peut être rébarbatif mais il peut aussi être amusant. Et c’est plutôt ce qu’on a essayé de choisir dans notre sélection. Le sexe dans l’art ou au cinéma peut aussi avoir une grande répercussion sur les gens. Par exemple, le film l’Amant de Lady Chatterley de Pascale Ferran a touché pas mal de femmes. Elles en ont beaucoup parlé. Et ce film a joué sur leurs émotions, leur désir.

La 2ème partie iconographique sont les positions essentielles. Ca vous semblait incontournable ?

On ne voulait pas faire que de la théorie. J’ai vraiment insisté pour ces dessins. On a choisi les positions et un dessinateur les a réalisées pour nous. Les images sont immanquablement ce que les gens regardent en premier avant de se lancer dans la lecture…

Vous êtes gynécologue. J’ai entendu beaucoup de gynécologues dire qu’eux s’occupaient de reproduction, mais pas de sexualité…

Malheureusement ! Je sais que beaucoup ne se sentent souvent pas concernés par les problèmes sexuels de leurs patients. Les femmes les considèrent comme les spécialistes de l’appareil génital et donc par extension, elles sont tentées de leur parler de leurs problèmes sexuels, mais les gynécologues, eux, ne se sent pas spécialistes de l’appareil sexuel. Dans les séminaires, les conférences que je fais, je leur dis « si quelqu’un s’adresse à vous, au moins écoutez-le, et ne le laissez surtout pas sans réponse. S’il a eu le courage de vous parler de sa sexualité, il faut l’aider, sinon il n’osera plus jamais. Il faut au moins l’orienter vers un sexologue qui sera plus en mesure de l’aider. »

Vous êtes vous même psychosomaticien, qu’est-ce que cette spécialité exactement ?

C’est un médecin qui s’occupe des problèmes du corps liés à la tête. Donc pas exclusivement de problèmes sexuels mais souvent.

Sentez-vous plus de souffrance chez les hommes ou chez les femmes par rapport à la sexualité ?

Ce n’est pas comparable et leur souffrance ne s’exprime pas de la même façon. Les femmes vont se plaindre d’abord sur leur manque de désir. Soit elles ont envie, soit elles n’ont plus envie. C’est tout ou rien. Les hommes, eux, seront plus sur le symptôme. L’érection est le problème. Le « pas de désir » les préoccupe peu. Il faut juste que l’outil fonctionne. Mais on ne peut pas comparer leur degré de souffrance. L’homme aurait tendance à se dire « c’est pas de ma faute » et la femme à culpabiliser dans un 1er temps. Elle peut ensuite considérer que c’est pas grave, qu’il n’y a pas que ça dans la vie et à se désintéresser du problème. Mais homme comme femme, il faut pouvoir les aider.

Les magazines parlent souvent du fossé entre les 2 sexes et de leur incompréhension mutuelle croissante, quelle est votre analyse personnelle ?

Effectivement il y a un fossé, mais il faut être conscient de ce fossé. Il faut juste comprendre que l’autre n’est pas comme nous. Il est autre et donc lui parler autrement. Si je sais que quelqu’un est différent de moi, je l’aborderai différemment. C’est la clé pour se comprendre et avancer main dans la main.

Vous êtes donc optimiste et vous pensez qu’une sexualité épanouie pour le plus grand nombre est à venir ?

Je suis très optimiste ! Je milite contre la guerre des sexes qui ne sert à rien. On a vu les dérives que ça a provoqué aux Etats-Unis et notre but est d’éviter une telle erreur. Une meilleure écoute et une compréhension mutuelles sont définitivement les seules solutions aux problèmes de relation hommes-femmes.

[gris]Constance de Médina[/gris]