Vera Svechina
EntretiensLe 09/03/2009
"I was mesmerized by beauty of pole dancing, power of illusion and the thin line between reality and fantasy."
Piquante jeune femme brune à l’enthousiasme communicatif, Vera Svechina est écrivain, photographe et réalisatrice. Baignée dans l’univers des strip clubs américains de la West Coast, elle travaille en tant que danseuse chez Hustler et y réalise des photographies débordantes de sensualité.
Comment vous présenteriez-vous auprès de nos lectrices ?
Je m’appelle Vera Svechina. Je suis d’origine russe. Mon premier ouvrage, Last train from Roppongi, a été publié en Russie en 2005 et je suis actuellement à la recherche de producteurs afin de boucler le tournage de mon premier film adapté de mon livre. Pendant ces 8 derniers mois, j’ai développé un travail photographique lié au club Hustler de San Francisco où je travaille.
Quelles sont les thématiques principales soutenant votre travail ?
J’aime mixer réalité et fiction. Cette combinaison m’intéresse beaucoup. Parce que les couches de réalités sont nombreuses et varient d’une personne à l’autre. C’est fascinant pour moi d’en capturer quelques-unes sachant que je passe à côté d’autres qui me restent cachées. Depuis plusieurs années, lorsque j’ai commencé à travailler au Japon en tant qu’hôtesse, je pense que j’étais inconsciemment à la recherche de scènes de jeux érotiques dans les clubs comme illustration de ce métissage.
Quels photographes vous inspirent ?
Tout d’abord les photos de Jean Pigozzi. En les découvrant j’ai réalisé que l’on pouvait décider du cours de sa vie. C’est très inspirant. Ensuite je me rappelle le choc artistique que j’ai ressenti la première fois que j’ai découvert le livre de photos de Nobuyoshi Araki : ces photos de jeunes femmes attachées avec des cordes ont eu un impact fort sur moi. À cette époque, je voyageais autour du monde, mais je percevais intuitivement que quelque chose en moi était bridé, c’est sans doute la raison pour laquelle ces images ont résonné en moi. Au Japon où j’ai vécu quelques temps, j’ai découvert un autre ouvrage réalisé par une très jeune femme, Hiromix (Hiromi Toshikawa). Ses photos étaient vraiment étranges. Elles étaient libérées de toute contrainte classique de l’idée commune de ce que doit être une photo. Elles dégageaient une grande pureté. Son travail m’a beaucoup touchée.
Comment la photographie a-t-elle fait irruption dans votre vie ? Depuis quand ressentez-vous ce besoin de photographier ?
Je me rappelle avoir toujours été attirée par les appareils photographiques. Même aujourd’hui lorsque je me rends dans des boutiques spécialisées dans la photographie, je suis nerveuse. Quand j’ai grandi, j’avais à ma portée tout le matériel nécessaire pour réaliser des photos en noir&blanc. Nous utilisions mon frère et moi la salle de bains en guise de chambre noire afin de développer nos photos et nous nous amusions beaucoup ! J’adorais la lumière rouge. Néanmoins il n’était pas évident de préserver le noir total, quelqu’un avait toujours besoin d’utiliser la salle de bains et allumait malencontreusement la lumière. Nous avions quelques appareils à la maison, mais les vieux appareils russes étaient difficiles à utiliser, je ne m’en suis jamais servi. Plus tard quand je suis arrivée à San Francisco pour étudier le cinéma, j’avais l’habitude de me rendre au Japon l’été pour y travailler en tant qu’hôtesse. J’avais fait l’acquisition d’un appareil japonais et pris l’habitude de photographier les choses qui retenaient mon attention, certaines étaient véritablement très belles. Je n’avais aucune idée de ce que j’étais en train de faire. C’était magique. Et j’ai adoré ! J’ai pris des photos de sources chaudes dans lesquelles je me baignais. C’est également au Japon, lorsque les téléphones portables avec appareils photo sont apparus, que j’ai commencé à photographier avec mon téléphone. J’ai d’ailleurs utilisé ces photos pour la couverture de mon livre ! Lorsque j’ai commencé à travailler pour Hustler, j’étais impressionnée par la beauté des filles et le pole dancing ! J’ai immédiatement su que les photos issues de cet univers seraient magnifiques. Il n’était pas permis de photographier, mais un jour n’en pouvant plus, j’ai commencé à le faire. J’ai été prise en flagrant délit et suspendue pour une semaine. Une fois de retour j’ai promis de ne pas recommencer mais c’était juste impossible. Grâce à l’aide des filles qui étaient très coopératives et à celle des managers qui ont finalement été séduits par mes clichés, j’ai pu réaliser ce livre. Ils ont tous été très impressionnés. Alors je pense que mon désir se déclenche à chaque fois que je vois quelque chose de beau.
Vos premières séries mêlaient corps et nourriture d’une manière très sensuelle, comment êtes-vous arrivée à cette pratique ?
Au cours de mon dernier semestre à l’école de cinéma, j’avais pris tous les cours d’image animée possible. Je ne savais plus quel cours suivre alors j’ai opté pour Ia photographie. C’est à ce moment-là que j’ai commencé à me sentir concernée par l’étude de la sexualité, j’ai grandi dans une atmosphère familiale très conservatrice. J’étais en conflit interne entre notamment le sexe, l’amour et les relations. J’avais de nouveaux amis, un couple de Russes peintres et chanteurs. Dans le cadre de mes cours, je voulais les photographier dans leur intimité afin d’illustrer les oppositions masculin-féminin. Ils étaient très beaux ensemble et très ouverts. J’étais très excitée par le fait de travailler avec eux. Pour mon diplôme, je voulais présenter des photos de nu. Je devais venir chez eux dans la journée, ils devaient se dévêtir et s’allonger sur le lit devant la fenêtre. Nous avons esayé et c’est là que l’idée des fruits et légumes s’est présentée. Lorsque j’ai tiré les photos à l’école, la magie était encore palpable. Mon professeur a regardé les photos et dit « Je ne sais vraiment pas comment tu arrives à faire ça » moi non plus d’ailleurs je n’en avais aucune idée. Les clichés apparaissaient naturellement. J’aurais souhaité prolongé le projet mais c’était le temps du diplôme.
Est-il plus facile pour vous d’approcher les filles, de partager leur intimité ?
En tant que femme, oui mais en tant que strip dancer encore plus. J’ai travaillé avec elles très longtemps, deux ans avant de commencer à prendre des photos. Mais je comprends également que j’ai la responsabilité de ne pas briser la confiance qui existe entre elles et moi. C’est un sujet sensible. Une vraie beauté se dégage de l’atmosphère des strip cIubs. Je cherche à partager ce sentiment avec d’autres. Je me sens privilégiée de pouvoir y travailler et photographier librement les filles. Mais je pense qu’un homme qui travaillerait sur place aurait également la possibilité de le faire.
Pensez-vous que votre projet soit également politique ?
Je ne suis pas vraiment au courant de la règlementation des clubs et je ne suis pas certaine que cela ait un lien avec la politique. En Russie, les clubs ne font pas partie de la pop culture autant qu’aux USA. Mais je pense qu’il est nécessaire de faire évoluer les mentalités en montrant ce qu’est la réalité de ces clubs et tout ce qu’ils véhiculent de positif dans la société. Les strip clubs sont un divertissement ! Par exemple on y croise souvent des soldats revenus d’Iraq. Certains n’ont pas de petite amie et viennent ici pour s’amuser ! Les filles dansent pour eux et leur souhaitent un bon retour parmi nous. On y croise également des hommes dans des fauteuils roulants. J’y ai rencontré des docteurs, des professeurs, des avocats, des scientifiques, des programmeurs informatiques, des réalisateurs et des acteurs, des personnalités de la musique ou du sport, des businessmen, des étudiants, des policiers, des écrivains, des producteurs, des journalistes… Toute l’Amérique en sorte, le monde… beaucoup de couples également ! Chaque Noël nous organisons des danses de charité afin de collecter des fonds permettant d’offrir des jouets aux enfants défavorisés. Je pense que c’est super mais certains organismes ne veulent pas de notre argent. En réalité les enfants se moquent de la provenance de l’argent tant qu’il est donné avec amour. Moi même j’ai grandi sans avoir autant de jouets. Il serait même intéressant que le travail dans les clubs puisse faire partie du programme d’études de sexologie à l’Université. Que les filles puissent enseigner leur savoir ou suivre des étudiants en stage dans les clubs pendant 1 ou 2 ans. Pourquoi pensez-vous que les costumes de nurse soient si prisés ? Cela aurait un impact politique fort, réduisant les scandales inutiles.
Pensez-vous que le rejet de ces clubs vienne d’une ignorance de ce qui s’y passe en réalité ?
Je pense que cela vient principalement d’un manque d’éducation sexuelle d’une non-acceptation de notre être sexué. Nous devrions accepter notre sexualité ainsi que la présence de l’industrie du sexe dans nos sociétés. Ils ouvrent un espace ludique où expérimenter notre sexualité ou encore proposent un véritable travail. La société devrait pouvoir en bénéficier pleinement. Les gouvernements pourraient assouplir la loi afin de privilégier cette éducation. Nous, les artistes, avons le pouvoir de faire bouger les choses. Les strip clubs ne sont pas des lieux de prostitution mais de plaisir et de divertissement où libérer ses fantasmes devient possible. Si nous pouvions instaurer un LOVE GAMES DAY il y aurait moins de guerres et plus de paix dans le monde !
Non seulement vous avez publié un livre, mais vous vous impliquez également dans la réalisation de films. Le cinéma vous intéresse-t-il dans son rapport entre sensualité et mouvement ?
Aujourd’hui, je pense que ce n’est pas une simple coïncidence si j’ai commencé à travailler pour Hustler. Parce qu’Hustler se bat pour la liberté d’expression. Ma vie créative a débuté par l’écriture quand j’étais très jeune. Nous avions beaucoup de livres et je lisais énormément. J’ai toujours voulu écrire, pour moi c’est le moyen le plus facile de m’exprimer. C’est comme ça que mon livre est arrivé… quelque chose de magique s’est produit. Maintenant c’est réel. Quand je suis allée au Japon pour la première fois en 1993, je ne connaissais rien à la réalisation de films, mais la première chose à laquelle j’ai pensé après avoir travaillé un moment en tant qu’hôtesse de club était que cela ferait un super film ! C’était tellement le bazar ! Cela m’a amené à étudier le cinéma aux Etats-Unis. Le cinéma est une illusion, les images créent un effet de mouvement qui est à la fois magique et réel. J’ai toujours rêvé de réaliser mes films ce qui est devenu réalité lorsque nous avons entamé la réalisation de mon premier film en Russie. Peut-être que la beauté des strip clubs est une illusion, de la magie ou de la réalité. Nous pouvons tous en décider après avoir pris connaissance de mon travail photographique…
Vous semblez également très présente sur Internet notamment via votre blog, est-ce une façon de partager votre expérience avec un plus large public ?
Après mon film, qui ne m’a pas rapporté d’argent, je ne savais plus que faire, que penser, alors j’ai créé mon blog qui devient aujourd’hui un site : www.russiangeisha.com. C’est une excellente façon de communiquer, de partager mon point de vue avec les gens, par le biais de Google et plus particulièrement "Blogger", j’adorerais développer cette relation dans le futur… Merci de m’y aider !
Est-ce que vous avez une exposition de prévu bientôt ?
Oui. Effectivement... Mais je vous en dirai plus dès que les dates seront fixées !
[gris]Saskia Farber[/gris]
[gris]http://verasvechina.blogspot.com/ "LAST TRAIN FROM ROPPONGI"
http://www.hustlerclubsf.com[/gris]
Commentaires (3)
Les russes sont toujours aussi extravagantes !
c’est quoi en encore ses préjugés à la con. Tu ne connais même pas la personne et tu te permets de juger.Mais pour qui te prends tu ?
Son travail , c’est de l’art c’est pas comme tout ces trucs porno ou juste commercial mais ça tu ne peux pas le comprendre.C’est pas bien grave , reste dans ta bulle.
je me permettrais tout de meame de faire qleuques bre8ves objections e0 tes propos Lola. Toutes les conclusions, justes ou errone9es, au sujet de la communaute9 rom, sont be2tis sur une addition de faits divers. Preuve s’il en est, tes propres dires. Au risque de me re9pe9ter, on a l’habitude de remettre tous sur le dos des gitans, or on ne s’attaque jamais, e0 aucun moment, aux sources des proble8mes que tu viens d’e9nume9rer. Oui, ils volent, ils pillent, ils vivent dans des bidonvilles etc. Que faire alors ? les enferme9s ? tous ? Les vire9s ? Of9 ? Les laisser-faire ? Oui, mal gre9 bon gre9, en Bulgarie on se borne e0 constater que les roms sont le plus tarabiscote9 des fardeaux porte9es par la socie9te9. Par manque de capacite9 et de volonte9, politique et socie9tale, on reste borne9s sur nos positions, satisfaits de l’approbation que nos amis nous donnent e0 table. Soit dit en passant, les gitans qui coupent les foreats en Bulgarie ne font qu’exe9cuter une demande de groupes bien plus influents. Cela concerne toutes leurs activite9s e0 la limite de la le9galite9. Elles se font au profit de structures opaques tre8s bien prote9ge9es. Pour finir ce bref propos, il est de ne9cessite9 qu’on s’attaque aux sources et non aux finalite9s des proble8mes cause9s par le roms. Education, discrimination positive (alle9gement partiel des charges pour les employeurs, des places re9serve9es dans les administrations etc.). Le tout marie9 e0 un contrf4le plus se9ve8re et honneate, qui est, le0 encore, de9faillant non-seulement e0 l’e9gard des roms. PS : J’ai oublie9 de le pre9ciser dans mon pre9ce9dent post, mais l’article est tre8s plaisant. Le ton, habillement ironique, transpose bien celui avec lequel la plupart des bulgares abordent l’e9nigme rom.