La mécanique des hommes
Le 21/04/2009
"Le sexe masculin est ce qu’il y a de plus léger au monde, une simple pensée le soulève." Frédéric Dard. Bander ! Cette obsession masculine date de la nuit des temps. Ne disait-on pas à Rome : est Ipsa Mentula / pénis est plus précieux que ma vie !? Mais si la traduction littérale de ce proverbe désigne « l ’organe (…) permettant la naissance d’un être nouveau… », il faut surtout y voir l’apologie de « l’emblème du principe de la fécondation vitale (…) vénéré comme (…) symbole de la nature créatrice ». Dans tous les cas, l’un et l’autre n’ont jamais laissé personne indifférent !
Taillé pour l’aventure ou sur-mesure ?
« La taille ne compte pas si on se concentre sur le plaisir de la femme »… « petite travailleuse vaut mieux que grosse paresseuse » ou encore « le vagin de la femme est adaptable » : tous les arguments sont fournis pour rassurer l’homme rarement satisfait des dons de Dame Nature. Petite, ils la veulent grosse, grosse ils la souhaitent imposante, imposante, ils font fuir les femmes ! Mais d’où vient cette idée fixe de mesurer son sexe ? D’un continent à l’autre, on le vénère plutôt 11 000 fois qu’une : monuments, odes à Priape et Osiris (Dieux phalliques), animaux totems, peintures... Et du spirituel au charnel se tisse un lien entre sa vocation de virilité et le pénis-trophée, proportionnel à respect récompenseraient les mieux nantis. Et déclencherait le désir d’amour : [elle] « … se précipita sur Bahloul, elle saisit son membres entre ses mains et se mit à l’examiner. Elle s’étonnait de sa grandeur et de la magnificence de sa création, de sa force et de sa dureté. Elle s’écria : Ceci est la perdition de toutes les femmes et la cause de bien des malheurs ! Oh Bahloul, je n’ai jamais vu un plus beau membre que le tien ». (Le Jardin Parfumé de Cheikh Nefzaoui). Mais non, Dame Nature décide. Les hommes établissent à ce niveau inconsciemment une hiérarchie entre eux. Inconsciemment ? La psychanalyse explique que l’enfant, amoureux de sa mère constate qu’il ne peut rivaliser sexuellement avec le père porteur d’une verge plus conséquente et donc plus séduisante. De cette frustration infantile, naît un complexe pas toujours résolu à l’âge adulte se fixant sur cette maudite taille ! Impossible pour certains de se contenter des standards (entre 13 et 18 cm en érection). Et rares sont les civilisations qui, à l’instar de la Grèce ancienne, encensent les toutes petites verges des éphèbes.
La vie pas toujours rose du pénis
Sans trop s’attarder sur les maux du pénis, il est toutefois important de rappeler que de nombreux rites initiatiques ne l’ont pas épargné. Le plus courant est évidemment la circoncision. Pratiquée pour des raisons religieuses (Islam, Judaïsme) ou médicales (Phimosis), l’ablation du prépuce a ses éxégètes comme ses détracteurs. Gérard Lenne, auteur de De la fellation – Comme idéal dans le rapport amoureux, la qualifie de mutilation. Pour d’autres, a contrario, elle augmenterait le plaisir de l’homme circoncis et la gourmandise des « utilisatrices ». Le débat croît dans les médias ! D’autres pratiques ancestrales frisent la barbarie. Ainsi la supercision consiste à déchirer volontairement le prépuce en deux avec une tige de bambou. On « subincisait » une verge en l’ouvrant du méat au scrotum. Il est difficile de mesurer encore ces pratiques, interdites mais rituelles de certaines tribus. Outre les mutilations culturelles, des modifications corporelles telles le piercing du prépuce, du scrotum et parfois du gland se développent de plus en plus pour des raisons érotiques.
Un orgasme dans le jardin d’Eden
Quand, dans le jardin d’Eden, Eve remplaça Lilith au pied de son arbre où Adam vivait heureux, le premier homme fut d’abord satisfait. Il passait de la fougueuse rebelle à la belle amoureuse qui, pour sa rédemption, n’eut de cesse de devenir (ainsi que ses filles) aussi pure que Dieu et la société le souhaitaient. Les filles de Lilith investirent, quant à elle, le domaine de la sensualité au prix de leur réputation. Et les descendants d’Adam comprirent que les deux femmes en une seraient l’idéal. « J’ai souvent constaté qu’être avec une partenaire active, gourmande, faisait de moi un meilleur amant (rapports plus longs, plus variés, plus rythmés). C’est finalement un appel aux femmes… » constate Jérémy, 31 ans, en couple libre. L’évolution, le féminisme et la libéralisation des mœurs y ont contribué et aujourd’hui les femmes font l’amour plus tôt et plus souvent. Pour le plus grand plaisir des hommes. Mais qu’est-ce qu’un orgasme d’homme exactement ? « Médicalement », Wikipédia nous dit qu’il « se caractérise par des contractions rapides et rythmiques de la prostate et de l’urètre et des muscles à la base du pénis. Ces contractions expulsent le sperme par le méat urétral du pénis. » C’est l’éjaculation et tout ça dure au maximum 10 secondes. Et pour l’obtenir nous confie Jean-Gilles, heureux célibataire de 34 ans : « Je pense que tout ça découle de l’alchimie qui se crée entre un homme et une femme : on est un bon coup pour l’une, pas pour l’autre et vice versa. Et c’est cette alchimie qui crée la complicité, la levée des tabous et les jeux sexuels entre nous. » Les hommes peuvent avoir un orgasme sans éjaculer ou éjaculer mécaniquement. Tout dépend de comment on... « le » prend ! Et la masturbation n’est pas forcément un pis-aller pour les messieurs qui déclarent se caresser savamment et avec un véritable plaisir. Las, fellation et masturbation ne seraient pas une panacée pour les femmes... « Quand j’ai un orgasme c’est indéfinissable… comme si je me vidais de mon énergie » relate Raphaël, 31 ans. Mesdames, vous connaissez ? La période réfractaire, la petite mort et l’homme qui souvent se tourne et dort.
Etre ou ne pas être une fellatrice ?
La lutte masculine pour l’orgasme passe souvent par la fellation. Vivre sans relève de l’impossible. « … On pourrait lui élever une statue, un monument, un mémorial, écrit Gérard Lenne à ce propos avant d’ajouter : Pourquoi la fellation serait-elle inférieure au coït lui-même ? » Aucune raison, effectivement. Mais à moins d’une souplesse hors normes elle réclame le concours actif d’une bouche et de mains. Et de nombreux hétérosexuels tombent hélas d’accord pour trouver les femmes plutôt malhabiles : elles astiquent du bout des doigts, laissent traîner des dents, oublient carrément tout ce qui entoure le pénis (testicules, périnée, anus…). Pire ! Au delà de ces problèmes techniques, elles ne montrent guère d’enthousiasme : comme aurait pu le chanter Brassens, 95 fois sur 100, les femmes s’ennuient en suçant et l’homme aussi ! « Il y a une différence perceptible entre les femmes techniquement douées mais qui n’aiment pas faire une fellation, et les autres, même plus maladroites, mais dont on sent qu’elles aiment vraiment sucer, reprend Jean-Gilles. Ce sont aussi celles qui resteront dans nos mémoires. » Et qu’on rappelle le lendemain ? En revanche, pour la masturbation, l’avis est unanime, eux seuls savent quand, où et comment jouer de leur instrument, un peu comme les femmes avec leur clitoris... Ce qui n’empêche pas une masturbation mutuelle, pour éveiller les sens... Mais quelles sont les raisons qui refroidissent certaines femmes devant cet acte d’amour si excitant pour les hommes ? A droite et à gauche, elles s’expliquent : « les odeurs dans le caleçon ça donne pas envie... » « je déteste le goût du sperme » ou plus romantique : « selon moi c’est un geste d’amour, en tout cas, je suis meilleure quand j’aime mon copain qu’avec un inconnu » répond Marie, 36 ans. Ajoutons qu’avaler ou non se négocie et que certaines femmes trouvent que la position elle-même les placeraient dans une attitude trop soumise. Toujours proposer un 69, au menu…
La sensualité est ici et ailleurs
« La fellation fait souvent partie d’un « protocole du rapport réussi » , commente Mariani, 39 ans. Mais moi je trouve que les femmes devraient plus nous caresser tout le corps. Le pénis n’est pas le seul instrument de plaisir. Notre peau est sensible partout ailleurs. Les femmes devraient aussi plus imposer leur désirs. Leur demander ? Non, comme ça, ce qu’elles m’offrent, je suis sûr que c’est réellement ce qu’elles veulent. En fait il faudrait trouver celle qui sait cultiver les vices de son homme. Une vraie volonté de découvrir les fantasmes de l’autre en l’obligeant à y faire face, réveiller ses instincts, oui c’est un peu psy mais surtout très excitant. » En, fait, si l’on devait définir un pénis heureux, on pourrait dire qu’il doit pénétrer... un vagin, une bouche, un anus, recevoir des caresses mais surtout « voir et être vu » ! « Voir mon sexe s’enfoncer dans la bouche ou dans le vagin participe au moins à 30 ou 40% de mon plaisir, révèle Jean-Gilles. Le regard, c’est une sublimation de l’acte. » D’où un succès certain pour les femmes qui assument ce qu’elles font (ou disent) pendant l’amour. Se cacher ou fermer les yeux prive les hommes de la contemplation de l’ouvrage. Regarder, admirer son pénis, jouer très naturellement avec lui sans le blesser enchante son propriétaire sans avoir à recourir à des pratiques plus violentes telles que la gorge profonde ou la double pénétration… En fait, il suffit d’adopter quelques codes du genre : longs regards énamourés, un peu de femelle attitude, quelques ronronnements et pas mal de paillardises émeuvent l’amant. Et un amant ému est un amant ardent.
Les bourses ou le vit ?
L’examen de la virilité ne saurait se cantonner à une seule partie du costume trois-pièces. Centres de production des spermatozoïdes et des hormones sexuelles, les testicules font partie des zones érogènes de l’homme et sont très sensibles au contact. « Un coup de langue sur le bas des testicules est toujours très agréable, reconnaît Antoine, 29 ans, mais ça peut aussi chatouiller, lorsque c’est mal fait ou que la complicité n’est pas là. » De même, les caresses à cet endroit laissent rarement ces messieurs insensibles, mais gare aux mouvements trop énergiques sur cette partie qui peut procurer d’intenses plaisirs comme des douleurs aiguës. On ne touche pas n’importe comment aux bijoux de famille. Alors qu’ils pendent en temps normal, les testicules se rétractent durant l’érection et lorsqu’il fait froid, sous l’effet du dartos (muscle du scrotum) qui est sensible à ces deux facteurs. Ces glandes mesurent en moyenne 4 cm de long pour 2,5 cm de large. Inutile de s’étonner en constatant que celle de gauche descend plus bas que celle de droite : elle est simplement souvent plus lourde.
Je bande donc je suis
Bander est le symbole de la virilité. Ne pas bander est donc ponctuellement un drame pour l’homme. Quand l’érection n’est pas au rendez-vous alors que le désir est là, tout est remis en question. Et alors que les femmes tentent de les rassurer « Je te promets, ça n’est pas grave, ça ira mieux la prochaine fois… », les hommes n’entendent rien et ne se remettent pas de leur perte de virilité. Les causes peuvent être multiples : rien n’est plus sensible à la routine, au stress et à la dépression qu’une verge. Il faut donc contourner tous ces « tue-l’Eros » par la fantaisie et un dialogue permanent, soigner ses fantasmes en valorisant son imaginaire et si vraiment ça bloque, consulter un sexologue. Si en revanche, l’homme a une libido sans failles, mais que sa femme s’éloigne par manque de désir, il aura souvent envie d’aller exercer ses talents ailleurs, juste pour que sa virilité soit constatée et approuvée. D’où ce concept d’amour physique qui n’a aucune valeur sentimentale. Il semble donc très important de traiter si bien ce bel organe que ça en devienne une vraie déclaration d’amour.
Au fond, l’attitude face au pénis est assez révélatrice de l’estime dans laquelle on tient son partenaire. Le nier, le mépriser ou le refouler laisse généralement peu présager d’une relation sensuelle et ludique… Paradoxalement, c’est plus facile le premier soir où chacun veut émerveiller (rien de moins) l’autre. Ensuite, la complicité amoureuse rend tacite la bonne harmonie des préférences personnelles. Normalement l’homme et son pénis ne font qu’un mais ce propriétaire se complaît souvent à penser qu’ils sont deux : d’où la manie de lui donner des petits surnoms, de le caresser et de le soupeser… L’expression « penser avec son sexe » le confirme. Tout d’un coup, ce petit membre est personnifié et aucun cerveau masculin, si équilibré soit-il, ne peut lutter. Alors même si certaines femmes portent une importance toute relative au pénis, il faut garder à l’esprit qu’en plus d’être le centre de l’anatomie masculine, il est au centre de leur vie. Qu’il soit « vrai, faux, laid, beau, dur, mou, avec un grand cou, gros touffu, p’tit joufflu, grand ridé, mont pelé,… »*. Et qu’ils attendent qu’on l’aime sans condition.
Fannette Duclair
Références :
De la fellation – Comme idéal dans le rapport amoureux de Gérard Lenne – Collection l’attrape-corps chez La Musardine (cité)
Histoires du pénis des Dr Marc Bonnard et Michel Schouman – Editons du Rocher (cité)
Du Culte du Phallus – Jacques Antoine Dulaure – Editions Pardes
* Le Zizi de Pierre Perret
A La Musardine, des petits guides ludo-éducatifs sur la fellation et les façons de faire l’amour à son homme…
Autres ouvrages :
Penisatlas – Collectif – Les Martiens The Big Penis Book – Collectif – Taschen
Commentaires (1)
Personnellement, je trouve extrèmement frustrant qu’une femme ne s’interresse qu’à mon sexe. Ce que j’aime dans l’amour, c’est avant tout la sensualité, l’abandon aux caresses de ma partenaire. Certaine femme pensent qu’un homme n’est satisfait que lorsqu’elle le conduit à l’éjaculation ; c’est pour celles ci un but a atteindre qui les rassure. Pour moi, l’éjaculation, c’est la fin de l’acte alors que ce que j’aime le plus, c’est l’intensité du désir lui même, le jeu des corps et des souffles. J’aime qu’une femme aime mon sexe, mais j’ai horreur d’être résumé à mon membre, si beau soit-il.. :-)