Damien Odoul

Le 21/04/2009

Damien Odoul, touche-à-tout invétéré (réalisateur, artiste, poète…), vient de réaliser l’Histoire de Richard O., film qui flirte avec un érotisme qui se fait rare au cinéma. Pour son 5ème long métrage, il a décidé de filmer l’intime en repoussant tout en douceur les frontières du cinéma dit classique. Il ne pouvait envisager de tourner ce film en « jouant » les scènes sexuelles, il voulait de la chair palpable et du plaisir brut. Il a donc obtenu de ses acteurs qu’ils se livrent corps et âmes devant sa caméra, sans tricherie, sans faux-semblants. Entretien avec un réalisateur passionné auquel, apparemment, peu de gens résistent.

Quel est le point de départ de l’Histoire de Richard O. ?

Ca fait 10 ans que je voulais être du côté du désir. Je voulais montrer l’érotisme. Pendant 4 ans, j’ai travaillé sur l’Histoire de l’Oeil de Georges Bataille. J’aime l’érotisme de Bataille. C’est surtout sa philosophie que j’aime, ses essais. J’ai toujours eu du mal à accepter sa fiction. On me proposait d’accepter librement l’Histoire de l’Oeil et j’ai sauté sur l’occasion. Hélas, ça ne s’est finalement pas fait pour des histoires de productions. J’y avais passé tellement d’années que ça m’a infiniment affecté mais je me suis relevé.

Ou O. comme Odoul ?

Oui, aussi ! C’est vrai que Mathieu Amalric est réellement mon double dans le film. On a confronté nos vies sexuelles, et j’ai mélangé le tout. On est à l’opposé, mais on s’est retrouvé sur le désir. Ce qui est drôle, c’est que dans le film, Mathieu a la même allure que moi. Bien sûr, je lui ai gominé les cheveux en arrière comme moi en ce moment, mais il a aussi pris ma démarche, mes attitudes. C’est une vraie éponge et il a su venir dans mon univers. Certaines femmes de ma vie sont ressorties du film en me disant que c’était troublant à quel point elles m’avait vu à travers lui. Mathieu m’a beaucoup donné. Il me dit aujourdhui « Tu m’as emmené loin. Je ne le referai pas… ». C’était un film qui ne pouvait se faire qu’à cet instant T.

C’est un film autobiographique ?

Non, ce n’est pas autobiographique. C’est un film sur le champ des possibles avec toutes ces femmes. Ce que je revendique, c’est ma curiosité envers les femmes en général. La figure de Dom Juan ne m’intéresse pas, celle de Casanova, si. Dom Juan est fictif et son but n’est que d’avoir un énorme tableau de chasse, alors que Casanova a réellement existé et il n’a fait l’amour qu’avec une centaine de femmes en 30 ans si je me souviens bien. Ca fait donc 3 femmes par an, guère plus. Ce n’est pas si spectaculaire !

D’ailleurs comment avez-vous pensé à Mathieu Amalric, qui entre nous, n’avait pas au départ le physique de séducteur nécessaire au rôle ?

C’est justement pour ça ! Personne n’avait jamais fait de lui un séducteur. 90% des acteurs français n’ont pas de corps car les réalisateurs ne savent pas les mettre en valeur. Ils se contentent de faire tourner toujours les mêmes, ceux qui sont charismatiques et qui ont un corps de jeune premier, mais ils ne pensent pas à révéler ceux pour qui ça n’est pas l’évidence. Et c’est justement ce contrepied que j’avais envie de prendre avec Mathieu.

Comment avez-vous réussi à le convaincre de jouer ce rôle ? Pas facile pour un acteur de films « classiques » de jouer des scènes sexuelles pour de vrai, sans simuler…

On a eu beaucoup de conversations autour de la sexualité ensemble. Il a compris que c’était essentiel que les acteurs aient de véritables relations sexuelles. Pour moi, c’était impossible, pour ce film, que les acteurs ne soient pas dans le réel. Il fallait être à l’intérieur d’une intimité. Mathieu était un peu réticent au début, mais c’est les actrices du film qui ont fait pencher la balance pour qu’il accepte. Elles m’ont aidé, elles ont été formidables. Elles m’ont compris et m’ont fait confiance. Déjà au casting, il s’est passé quelque chose d’incroyable : sur 14 filles castés, j’en ai pris 13. C’est très rare, de l’ordre de la grâce. Mais je leur avais aussi assuré qu’il n’y aurait aucun gros plan sur les parties intimes. On n’était pas dans une démarche pornographique. Mathieu ne comprenait même pas comment elles avaient pu accepter aussi rapidement, comment ça avait pu être si simple.

Comment avez-vous choisi ces personnages féminins ?

Dans l’Histoire de Richard O., j’ai voulu une vraie palette ethnique et physique. Elles sont nombreuses, pour qu’en fait il n’y en ait aucune. Que l’on ne s’attache pas aux caractéristiques d’une seule femme. Elles ont également un rôle très particulier. Elles sont véhémentes dans leurs propositions de fantasmes, très masculines alors que j’ai filmé Richard, le héros, en exacerbant son côté féminin. D’ailleurs, il se fait tuer par la 1ère fille à qui il dit non…

Elles sont toutes des guerrières dans le film ?

C’est vrai que ces aventurières sexuelles ne sont que des guerrières. Mais guerrières, pas guerrières, le pouvoir sexuel dépend rarement de ça. Au contraire. L’hystérie est souvent liée à la frigidité. Il y a beaucoup de femmes qui font croire qu’elles aiment l’amour physique alors qu’en fait, ça ne les intéresse pas. C’est juste pour rentrer dans une norme sociale.

Vous avez fait une proposition érotique, seriez-vous prêt à faire une proposition pornographique ?

Tout à fait, je pense qu’aujourd’hui, il pourrait y avoir une autre proposition pornographique, mais là n’était pas le propos sur ce film. Mon propos était de distinguer l’érotisme de la pornographie. De lui enlever cette étiquette glauque. J’ai essayé aussi de relier l’érotisme et le burlesque. A chaque couleur érotique répondait une couleur burlesque. Emotion et sourire. Mais à propos de la pornographie, quand on voit le film de Larry Clark, dans le collectif Destricted, il y a une autre proposition. Je pense qu’aux Etat-Unis et en Asie, ils sont dans une autre approche du sexe. En Europe, la mécanique de la pornographie est insupportable. 1er temps, fellation, 2ème temps, coït, 3ème temps, éjaculation. C’est obsolète ! Mais je vais y réfléchir sur un format court…

[gris]Constance de Médina[/gris]

Commentaires (1)

  • KLFWqJEoT

    Steph dit :Nico, je ne suis pas sure que le photoshop soit adlbssiime pour les de9fis, mais dans le be9ne9fice du doute, je ne dirai rien !J’espe8re que vous vous amusez bien. Je pense souvent e0 vous ! Ca y est on a eu les cle9 hier, les travaux commence lundi (moi aussi j’ai des vacances, 1 semaines pour tout casser dans l’appart), je vous enverrai l’e9volution des travaux ! Des bisous e0 vous deux !