La gourmandise

Le 04/09/2012

L’air sidéré de Franck accentua le sourire mutin de Leonore. Interdit, le rouge aux joues, il serrait dans son poing les quelques grammes de dentelle humide, mourant d’envie de les porter à son nez pour s’enivrer de leurs effluves.

À son retour des toilettes elle lui avait chuchoté avec un sourire prometteur : "j’ai quelque chose pour toi, mais je dois te le donner discrètement" et lui avait fait passer sous la tables le string qu’elle venait d’enlever, prise d’une impulsion soudaine… Ouvrant de grands yeux innocents, elle avait ajouté : "j’ai dû l’enlever, elle était trempée".

Pour ce 5e déjeuner, à l’issue duquel elle avait décidé d’enfin accéder au désir de Franck et de céder au sien, elle avait choisi une tenue délibérément stricte en apparence, mais subtilement sexy. Jupe crayon, escarpins à talon, chemisier en soie imprimé au décolleté profond. Dessous, elle portait un string en dentelle bleue et un soutien-gorge triangle sans armature, qui garantirait le moment venu un accès facile à ses seins à travers le chemisier. Rien que le choix de sa tenue l’avait excitée, et son désir était monté crescendo tout au long du déjeuner, alimenté par les regards et les effleurements de Franck et le ton de leur conversation, de plus en plus explicite.

Léonore avait fait la connaissance de Franck quelques semaines plus tôt, sur un site pour adultes désirant faire des rencontres légères. Elle ciblait les hommes de son âge ou un peu plus jeunes, célibataires pour la disponibilité, minces pour le plaisir des yeux et des mains. Elle sélectionnait les contacts sur la qualité formelle de leur message : orthographe, syntaxe, culture et humour, recherchant la complicité intellectuelle, indispensable pour atteindre la complicité sexuelle à laquelle elle aspirait. Elle partait du principe que les hommes intelligents et drôles faisaient les meilleurs amants, et ce présupposé s’était confirmé lors de ses précédentes rencontres, toutes fructueuses.
Le contact avec Franck, architecte lettré correspondant à ses critères intellectuels, n’avait pas été concluant tout de suite, car leur philosophie de la rencontre n’était pas la même. Là où Leonore souhaitait établir la complicité intellectuelle d’abord, passant par de nombreux échanges épistolaires puis quelques déjeuner de plus en plus chauds avant de passer à la suite, Franck était un homme pressé qui souhaitait établir la complicité sexuelle en premier lieu et entendait enchaîner premier dîner et sexe dans la foulée ! Comme le taquinait Léo, sa philosophie se résumait donc à " je te vois je te baise sinon je ne te vois pas" ! S’instaura alors entre eux une amusante joute épistolaire, chacun avançant ses arguments et valorisant son approche. Leonore faisait valoir l’excitation qui favorisait l’imagination et le fantasme, en menant le désir à son paroxysme avant de l’assouvir dans les meilleures conditions et de garantir la qualité des ébats.
Franck maintenait que faire l’amour était le meilleur moyen de faire connaissance.
Il fallut un premier déjeuner pour que la séduction de Leonore et son aisance à parler de sexe convainquent Franck.
Il décida que ses longues jambes, ses yeux verts et la promesse de sensualité contenue dans la liberté de ses propos valaient probablement la patience que cette troublante personne exigeait.

Au bout de nombreux mails et de 5 déjeuners, il en tenait enfin dans son poing l’éloquente confirmation… il ne tarda pas à reprendre ses esprits et parvint même à porter discrètement à son nez le tissu odorant, ses yeux se fermant de plaisir à ce parfum.
Quand il les rouvrit, il adressa à Leonore un sourire d’une gourmandise absolue assorti d’un regard incendiaire qui la combla d’aise. "Tu es décidément délicieuse" ajouta-t-il "et je vais me faite un plaisir de te dévorer". Puis il se leva pour régler l’addition, glissant dans sa poche l’objet compromettant, tandis que Leonore menaçait de se liquéfier d’excitation.
Fort heureusement il n’habitait pas loin, et ils parcoururent à vive allure la rue Saint Antoine jusqu’à la magnifique cour pavée de son immeuble. Ils ne résistèrent pas à la tentation de s’embrasser dans la cour, Léo le plaquant contre le mur en haletant de désir, son excitation commençant à couler le long de sa jambe. Tout en l’embrassant il cherchait à remonter sa jupe pour glisser une main entre ses cuisses mais celle-ci était trop serrée pour qu’il y parvint. Il recueillit du bout du doigt le liquide translucide qui descendait le long de la cuisse de Léo et le porta à ses lèvres avec délectation.
Puis ils montèrent les escaliers quatre à quatre, gémirent tous deux de désir et de frustration tandis qu’il bataillait pour ouvrir la porte, s’engouffrèrent dans l’entrée en jetant leurs affaires par terre, les vêtements volèrent et Léo enfin nue referma d’un coup de pied la porte restée entrebâillée, avant de s’allonger sur le parquet en ouvrant les jambes. Il se jeta sur son sexe avec gourmandise, tandis qu’elle soulevait et ondulait le bassin, gémissant maintenant de plaisir autant que de désir. Franck se régalait de sa chatte offerte, parcourant les contours de ses lèvres, excitant son clitoris, la pénétrant de sa langue. Elle arquait son corps sous la montée du plaisir, respiration coupée, yeux embués, douloureusement consciente de chacun des mouvements de langue de Franck, de ses mains soulevant ses fesses pour la savourer plus profondément, de son doigt excitant son anus, de ses soupirs de plaisir. Il adorait ça visiblement, s’enivrait de son goût et de son parfum, la dévorait en grognant de plaisir, et elle enfonçait ses ongles dans ses épaules pour ne pas hurler, jusqu’à ce que, submergée par la puissance de son orgasme, elle lâche prise dans un long cri, tremblant de tous ses membres et se répandant dans la bouche de Franck, subjugué par l’ampleur de la jouissance qu’il avait provoquée.
Elle s’apaisa enfin, secouée par les vagues refluantes, comme autant de répliques du tremblement de terre initial, et lui sourit en se redressant sur les coudes, puis se pencha vers lui en attachant prestement ses cheveux. Avant de s’offrir à son tour la gourmandise de sa queue délicieusement dressée, elle lui dit de sa voix éraillée par le plaisir : « Tu vois bien que ça valait la peine de faire monter le désir, c’est moi qui avais raison, comme toujours », ce qu’il admit bien volontiers avant de fermer les yeux sous la douceur de sa langue. « Et c’est pas fini, crois-moi, je meurs encore de faim » conclut-elle. Puis elle se tut, absorbée par le plaisir de sa tâche.

[gris]Léonore[/gris]

Commentaires (2)

  • MichelAime

    Beau texte pour une belle histoire de désir.
    C’est parfois difficile et frustrant d’attendre, mais ça n’est que plus fort après !

  • leonore

    Merci Michel !
    Dans le genre lente montée du désir, je vous recommande "Un pubis enchanteur", dont le contenu est bien meilleur que le titre, et très bien écrit. Par Cecily, je crois.