Homme à louer : épisode 19
Le 29/10/2009
Jean Harnettt n’était pas une inconnue pour l’agence. Héléna l’avait vu passer, au printemps 2007. Elle cherchait un « mari pour la soirée ». Jean Harnettt était alors une jeune et prometteuse négociatrice pour une multinationale de fruits américaine. Benoît remplit sa mission au-delà des espérances de tous.
Chambre 3225. Benoît, élégant comme un dandy des temps modernes, toque avec tact, puis n’entendant rien venir, indique de nouveau sa présence d’un toc tout aussi délicat. La porte s’entrebâille, s’ouvre en grand. Madame Harnett parait sur le seuil dans un charmant négligé, lèvres rouge carmin, et tignasse coiffée à la Louise Brooks. "Entrez", dit-elle en saluant d’une main ferme l’homme qui allait l’escorter, être son mari pour la soirée. Un embrun d’un parfum de luxe vampe l’atmosphère. "Je suis un peu en retard", poursuit-elle avec détachement. "La signature, juste là, aux forceps d’un contrat de quelques millions de dollars… Merci ! Il ne me reste plus qu’à m’habiller pour finir de me mettre en beauté. Servez-vous un café Clooney", glisse-t-elle avant de disparaître dans la pièce voisine. Ronronnement de la machine à café. "Je vous donne quelques consignes ?" perçoit faiblement Benoît qui décide de s’approcher. Calé dans l’embrasure de la porte, il sirote son moka et boit les paroles de la belle qui passe en revue tous les ingrédients nécessaires à une belle soirée de relations publiques, « repas d’affaires », « hommes d’État », « contrats mirifiques », « signatures » « conquêtes du monde », « homme d’envergure », « mari aimant », « stabilité du couple », « gage de confiance »… "Bien", dit simplement Benoît qui connait sur le bout des doigts toutes les ficelles de son métier. Il suit du regard chaque geste, chaque ondulation du corps de Jean. Occupée à se vêtir, elle semble ne pas se soucier du regard qui détaille et caresse chaque recoin de sa silhouette. Jean Harnettt passe d’abord un body avec armatures habillées de dentelle agrémenté d’un galon en franges de perles noires sous les seins nus. Jean règle les bretelles surpiquées, ajuste l’entresein frangé, se cambre à l’extrême pour fermer son corsage, geste qui finit de dessiner les courbes de sa taille. Puis la voilà qui attache à l’ensemble un string forme triangle ouvert, rehaussé de broderies également éclatantes et perlées. Cette vision a tôt fait de provoquer une érection magistrale chez l’escorteur. Mais en professionnel hautement qualifié, son visage ne laisse paraître nulle expression de ces stimulantes effervescences intérieures. Il se contente de regarder les seins que Jean Harnett exhibe, des seins souples, fermes, lourds, ronds, gironds, harmonieux, turgescents, délicats, exubérants, deux melons mûrs et fessus, au pédoncule gaillard. Maintenant Jean gaine ses jambes de bas de soie couleur suie, et enfile une robe chasuble. "Vous m’aidez ?", demande-t-elle en se tournant et en indiquant du doigt le zip. Benoît tend un main que Jean saisit aussi sec. "Embrassons-nous pour jauger de l’intensité de nos atomes crochus et juger de la crédibilité de notre couple éphémère !" Les lèvres se crochètent, les langues se délient. " Il me semble que nous n’aurons guère à faire semblant", déclare Jean en retroussant une nouvelle fois ses jolies babines et les collant furieusement à celles de celui qui pouvait dès lors presque passer pour son mari. "Poussons l’entretien !" Elle déboutonne le pantalon de Benoit, lui prend le sexe à deux mains, l’une à côté de l’autre et plaque un baiser enflammé sur le braquemart sculpté dans une marbre de carrare veiné. "À votre tour", ordonne-t-elle. Benoît, un rien cabotin et rebelle, se fait tendrement prier. Puis il soulève religieusement la chasuble, et applique sur ce bas-ventre ouvert à tous vents, un baiser fugace et prometteur.
Il est temps de filer, bras dessus, bras dessous, bague au doigt, pour honorer le rendez-vous. Tout se passe comme prévu. "Je vais et je viens, je vogue et je vole d’aventure en aventure", raconte avec malice Benoît devenu grand reporter pour l’occasion. "D’un continent à l’autre, de Rio à Kaboul. Nous nous apercevons, parfois Jean et moi, à travers les vitres d’un hub, lors d’un transit de bout du monde. Un regard suffit à embraser de nouveau notre amour. Nos retrouvailles… Ah, mon amour !" Benoît est excellent comédien. Il serre la main de Jean qui lui caresse la joue, la porte à ses lèvres et l’embrasse. De nouveau il se laisse envoûter par ce parfum de fruit gorgé de sucre qui chamboula ses sens deux heures plus tôt. Le dîner trois étoiles Michelin se termine, tout s’est déroulé à la perfection. On se sépare enfin, avec la promesse de se revoir dans un cadre plus professionnel pour conclure quelque contrat. Jean et Benoît regagnent l’hôtel à pied, main dans la main. "Vous fûtes un merveilleux cavalier. Chevauchons-nous ! Enfourchez-moi ! " s’exclame Jean à peine la porte de la chambre refermée. La seconde d’après les voilà nus, enlacés, embrasés. Jean s’extirpe de cette étreinte et s’allonge sur le lit. Elle se met sur le dos, ouvre ses jambes en grand, et d’un geste se livre toute entière à la fabuleuse érection de Benoît. Celui-ci saisit son membre et le pousse délicatement contre la vulve de son amante qui se redresse tout à coup pour aspirer goulument ce témoignage flatteur. La gaule de l’escorteur va grandissant de seconde en seconde et Jean sent le plaisir s’intensifier à chaque millimètre de la progression de son amant, elle se dit qu’elle est comblée. Plus tard un bruit sourd, faisant trembler les murs, sonne le glas de leurs ébats. Une corbeille de fruits attend Benoît à son réveil. Jean s’en est allée sans un bruit aux aurores, laissant un mot sous l’alliance encore chaude. « Adieu, amour d’un jour » signé Jean Harnettt. Un Petit Napoléon n’aurait pas souhaité plus sublime soirée de sacre.
Camomille Belleplante
Commentaires (1)
Stands back from the keyboard in amazement ! Tahkns !