Homme à louer : Episode 4
Le 12/04/2009
Qu’on vienne chez lui ? Dans le foutoir de son atelier ? En temps normal, le sculpteur aurait décliné l’offre mais elle lui avait promis une telle somme que Benoît n’avait pu refuser devant la masse de rappels des organismes de crédit auxquels il avait imprudemment recouru. Benoît connaissait Anne-Marie L** depuis seulement quatre semaines. Héléna avait considéré que le sculpteur correspondait parfaitement à la demande de cette femme, directrice d’une très grande entreprise de meuble, et qui désirait pouvoir passer quelques heures dans un bon restaurant de la capitale, un soir ou deux par mois, en compagnie d’un homme sympathique et cultivé, légèrement bohème mais élégant.
Ne fréquentant plus depuis vingt-cinq ans que des hommes et des femmes d’affaires Anne-Marie L** s’était peu à peu éloignée de ses premières passions de jeunesse. Adolescente elle avait en effet beaucoup fréquenté les musées, et avait même pris quelques cours de peinture. Mais tout cela lui semblait remonter à des temps immémoriaux. Sa vie avait bifurqué dans une tout autre direction. Seule la gestion de son entreprise comptait désormais. Gagner du fric, un maximum de fric, écraser ses concurrents, être la meilleure, voilà à présent ce qui constituait ses objectifs uniques. Mais, au fond d’elle, elle ressentait comme une lassitude. Et d’entendre ce garçon plein d’enthousiasme parler d’art la lavait de tous ces chiffres qui salissaient son imagination. Quand Anne-Marie frappa à sa porte l’artiste mettait un coup de ciseau final à sa dernière œuvre. Réveillé à sept heures par l’inspiration, il y avait travaillé sans discontinuer jusqu’à ce que les trois toc-toc de sa cliente lui fassent soudain prendre conscience du temps qui venait de s’écouler.
« Je suis affreusement confus. Je n’ai pas vu l’heure passer. Je suis dans un état de saleté…Vous savez ce que c’est, quand on travaille. Asseyez-vous… »
Anne-Marie éteignit son portable, posa son sac, s’assit sur le canapé et entama un examen des lieux. L’atelier de Benoît se composait d’une vaste pièce où s’entassaient pêle-mêle des dizaines d’ébauches de différentes dimensions en argile ou en plâtre. Certaines œuvres finies décoraient les coins. Au milieu trônait la dernière création, qu’il avait soigneusement recouverte d’une bâche beige. « C’est vraiment magnifique ce que vous faites… » constata Anne-Marie S’étant levée, elle s’était rapprochée d’un petit bronze représentant un couple de faunes jouant de la guitare. Contrairement à ce que le choix de ce sujet alliant hardiment mythologie et modernité aurait pu laisser supposer, le résultat était tout sauf ridicule. Les faunes guitaristes exprimaient une espèce de joie païenne qui communiquait au spectateur un étrange et impérieux besoin de rire et de chanter. C’était à la fois très drôle et très profond. Anne-Marie s’enthousiasma : « J’adore vraiment. Je ne saurais pas expliquer pourquoi mais j’adore vraiment… »
Elle revint sur le canapé. Benoît, tout en la remerciant, lui servit un verre de vin et s’enfonça en face d’elle dans un vieux fauteuil Louis XVI. Il arborait une tenue pour le moins débraillée. Dire qu’il était inélégant ne serait pas juste. Disons que son style s’avérait insolite pour un tel rendez-vous. Il portait de vieilles baskets trouées, maculées de glaise, un pantalon de jogging déchiré aux fesses, et une chemise de bûcheron à carreaux. Cet accoutrement lui conférait un charme indéniable. Benoît réfléchit aussitôt à un moyen de détendre l’atmosphère. Devant lui, sur une petite table jonchée de paperasses, de dessins, d’esquisses, une grande boîte était posée, qu’il ouvrit. Il en retira trois sachets de taille imposante, remplis d’inflorescences vertes à nervures orange, marrons ou rouges.
Agitant indifféremment les trois échantillons de cannabis, il demanda :
« Vous préférez quoi : Orange Bud, Super Skunk ou Red Hair ? »
La gorge d’Anne-Marie devint sèche. Elle était venue pour s’encanailler avec un artiste. Elle s’attendait (et espérait) des choses de ce genre. Elle avait juste peur de ne plus pouvoir rien contrôler ensuite. Elle craignait que ce type de produit, dont elle n’avait jamais consommé, n’altère son plaisir. Néanmoins, ne voulant pas mourir idiote, elle se lança :
« Qu’est-ce que vous me conseillez, monsieur le spécialiste ? »
Benoît sourit.
« La skunk ce n’est pas mal. C’est même très bien. Généralement c’est recommandé pour les états nerveux… »
« Vous me trouvez nerveuse ? »
« Non. Je disais ça comme ça. C’est plutôt moi qui devrais l’être… »
Après qu’il eut tiré trois longues bouffées sur le pétard, Benoît le tendit à Anne-Marie. Les deux taffes que la patronne inhala fébrilement la mirent dans un état incroyable. Elle se sentait si bien ! Sa bouche ne pouvait s’empêcher de sourire. Des frissons de bonheur parcouraient son épiderme électrisé. Elle riait de tout et de rien. Lui-même passablement euphorique, Benoît excitait l’hilarité de sa cliente par des histoires drôles ou des jeux de mots. Anne-Marie se tordait sur le canapé, pleurait comme une folle. Une vraie gamine de quinze ans ! Si ces employés l’avaient vue ainsi… Benoît comprit alors qu’elle désirait qu’il se déshabille et qu’il la prenne sur-le-champ. Hasard ou coïncidence, émanant de la chaîne hifi, la voix de Janis Joplin chantait à présent « I need a man to love ». Quoi de mieux indiqué ?
En bon professionnel, l’escort embrassa d’abord les cuisses dénudées de sa cliente, massa ses pieds avec un soin savoureux, ôta un à un les dessous qu’elle portait, puis enfila un préservatif. Anne-Marie bascula sur le ventre. Benoît avait jeté sa chemise sur le canapé, et tout en se caressant d’une main experte, elle respirait le tissu imbibé de phéromones, fascinée par la volupté qu’elle en retirait. Son odorat se trouvait décuplé par les effets de la skunk. Chaque inspiration lui causait des émotions inouïes. Elle se gorgeait de l’essence virile de Benoît… Connaissant idéalement les moindres secrets de l’anatomie féminine, la bouche du sculpteur sollicitait les zones voluptueuses les plus insoupçonnables, cachées dans les mille et uns recoins du corps de sa cliente. Sous le genou, dans le pli du bras, ses doigts pressaient des touches dont Anne-Marie avait jusqu’alors ignoré l’existence et qui la faisaient défaillir. Pendant que sa peau recevait les hommages des mains bienfaisantes, le nez toujours plongé dans la délicieuse étoffe, elle gémissait de contentement. Simultanément, son majeur s’enfonçait dans son vagin, pénétrant de plus en plus loin, sur un rythme de plus en plus soutenu. Dans son ventre l’orgasme germait. La tension, l’âpre et terrible tension, montait en elle, se développait, grossissait, la contraignant à accélérer sa respiration, et à inhaler sans cesse davantage l’odeur qui révolutionnait ses sens.
Elle fut prise de spasmes. Puis, brutalement, explosa en poussant une rafale de hurlements plaintifs. Benoît glissa sa tête entre ses cuisses tremblantes. Les premiers coups de langue du jeune homme apportèrent en Anne-Marie une volupté nouvelle. C’était comme si un petit animal fouineur venait de s’immiscer dans le secret de sa féminité. Et elle s’abandonnait à cet animal, s’imaginant qu’il allait bientôt lui dévorer la vulve. Par la fausse peur qu’il induisait ce fantasme de dévoration amplifiait le plaisir de l’executive woman. Se faire manger par un homme, que sa jolie petite chatte de femme se mue en mets de choix pour lui, et sentir qu’il se repaît de sa chair, qu’il la savoure, voilà qui l’excitait d’une façon indescriptible. Or, Benoît, à l’évidence, se régalait. Il aspirait les grandes lèvres avec une rage cannibalesque, suçait le clitoris turgescent comme un bonbon savoureux, dardait une langue intrusive dans le trou rétréci par des mois de célibat et que ses doigts élargissaient habilement. Les fragrances dégagées par la chemise enivraient plus que jamais Anne-Marie. Elle ressemblait à une junkie ayant la tête plongée dans un sac de colle.
Soudain un nouvel accès de jouissance la terrassa. Son sexe épancha une giclée de cyprine dans la bouche de l’escort et elle se tordit en criant dans le tissu à carreaux qu’elle tenait toujours appuyé contre son visage. Après qu’elle se fut un peu remise de ses émotions, elle se retourna. Une de ses jambes fut coincée contre le dossier du canapé, l’autre reposant sur le sol, en équerre. Elle regarda Benoît s’introduire en elle et réalisa alors à quel point le jeune homme était généreusement membré. « Mon Dieu combien mesure cette queue ! ». Un tel engin pourrait-il entrer en elle ? Elle constata avec ravissement que la nature avait tout prévu et qu’un vagin de femme est ce qu’il y a de plus accueillant au monde. Pas une queue, si grosse soit-elle, qui n’y trouve sa place…
Anne-Marie tendit ses lèvres à Benoît pour qu’il l’embrasse tout en la pénétrant. Elle avait un besoin de tendresse infini, et elle réclamait un maximum de caresses, de mots doux. Ses mains se perdaient sur celles du jeune homme, le long de ses bras puissants, de ses épaules carrées… Avec ses doigts elle peignait les cheveux du sculpteur dont le corps voguait au-dessus du sien et, de temps à autre, s’agrippait à son cul, qu’elle fessait, mutine, en poussant de petits rires nerveux. Aussitôt, Benoît accélérait la cadence, en bon étalon compréhensif qu’il n’est pas nécessaire de cravacher trop. Le pilonnage du jeune homme devint graduellement frénétique. Anne-Marie perdait pied. Elle ahanait. Elle se cramponnait aux biceps tendus de son partenaire. Elle reprit le vêtement qui avait couvert le torse du sculpteur pour y étouffer ses râles. Aussitôt l’effluve délicieuse l’emporta vers l’orgasme avec une force absolument démente. Jamais elle n’avait joui comme ça.
Ce fut avec un évident contentement que Benoît prit les 2000 euros que lui tendit Anne-Marie. Non seulement il avait beaucoup aimé faire l’amour avec cette femme, et lui donner tout le plaisir qu’elle attendait, mais, par la grâce de cet agréable moment, il se trouvait également sorti de la zone rouge. Il allait pouvoir éponger ses dettes les plus urgentes ! Que demander de plus ? L’artiste rêvassa quelques minutes à de nouveaux projets pendant qu’Anne-Marie remettait le haut de son tailleur en déambulant dans l’atelier. Elle désirait revoir une dernière fois les sculptures exposées, et en particulier les deux faunes guitaristes. Décidément ils lui plaisaient… « Combien pour les deux faunes ? » Benoît la regarda d’un air amusé. « Je vois dans vos yeux qu’ils sont faits pour vous. Prenez-les. Puisque je vous ai vendu mon corps, je vous donne mon art. » En prononçant cette phrase le sculpteur avait pris une voix de tragédien. Anne-Marie, hilare, l’embrassa sur la joue. « La fois prochaine vous me pétrirez, et je vous donnerai 3000 euros, lança-t-elle en s’en allant. A bientôt. »
Benoît la regarda s’éloigner avec un visage soudain assombri. 3000 euros pour réaliser le buste de cette femme, c’était peu d’argent pour beaucoup de travail (une centaine d’heures sans doute). Il avait peut-être mal fait de lui offrir aussi légèrement les deux faunes ? « Maintenant, elle doit croire que je bosse pour rien ! » se lamenta-t-il quand elle fut partie. Le pauvre Benoît se méprenait, évidemment, sur la matière qu’il aurait à pétrir…
[gris]Axelle Rose[/gris]
Commentaires (3)
j’adore votre humour.
L’épisode le plus réussi depuis le 1er :) (je les lis dans l’ordre)
richard - Bravo, vos photos sont tre8s spayms. C est chouette cette ide9e de remonter le temps, tu aurais fait une magnifique marquise, Adeline.Bizzzzz25 juillet 2012 17 h 34 min