Alors quoi de neuf, cher clitoris ?
Le 08/11/2019
Hop. Un scientifique vient livrer une énième version des fonctions du clitoris, ce cher inconnu. On a dit de lui qu’il jouait un rôle dans la reproduction, comme on a dit de lui - ces dernières décennies - qu’il était le seul organe à n’avoir d’autres fonctions que de donner du plaisir.
Un texte publié par un chercheur indépendant anglais, Roy J. Levin, le 5 novembre dernier dans la revue Clinical Anatomy, propose un grand retour en arrière en affirmant à nouveau que le clitoris joue un rôle dans la reproduction.
Selon lui, la stimulation du clitoris améliore le flux sanguin vaginal, lequel augmente l’oxygène et la température vaginale, ainsi que la lubrification qui facilite une pénétration indolore du pénis. Cette stimulation activerait également une zone du cerveau provoquant une combinaison de changements dans l’appareil reproducteur féminin, dont une variation dans la position de l’entrée de l’utérus, éloignant le col de l’utérus du sperme, l’empêchant d’avancer trop rapidement ce qui paradoxalement ralentit le sperme et améliore sa motilité.
Cela créerait donc une meilleure disposition à recevoir et à traiter le sperme afin d’obtenir une possible fécondation de l’ovule, quelle que soit la façon dont le clitoris est stimulé. Ainsi, il aurait une double fonction, procréatrice et récréative, d’égale importance. " Le mantra souvent répété, selon lequel la seule fonction du clitoris est d’induire le plaisir sexuel, est maintenant obsolète. Le concept change une croyance sexuelle majeure, et les preuves physiologiques sont maintenant évidentes " a déclaré l’auteur, ajoutant que l’ablation du clitoris pratiquée dans certains pays et certaines cultures créerait un éventuel handicap reproductif, en plus du handicap sexuel.
En 2005, la philosophe et professeure de biologie, Elisabeth Lloyd, avait rejeté avec force dans son livre " The Case of the Female Orgasm " l’idée que l’orgasme des femmes servirait un but évolutionnaire. Lloyd avait affronté presque tous ceux qui ont écrit sur le sujet : évolutionnistes, comportementalistes et autres, car pour elle lorsque nous cherchons à caractériser le plaisir sexuel chez la femme comme une aide à la fertilité, nous en faisons un mécanisme adaptatif, un sous-produit au service de l’espèce. Si l’on veut explorer la sexualité féminine de manière significative, dit-elle, il faut la considérer sur son propre terrain, où le plaisir existe très probablement pour lui-même, et non comme reflet du système masculin.
Nous aurions une foule de questions à poser aux deux spécialistes : comment sont conduites ces études ? Si Roy J. Levin avait raison, comment expliquer que le clitoris apporte du plaisir aux femmes de la petite enfance aux derniers jours de la vieillesse, c’est-à-dire bien plus longtemps que la période de fertilité ? Comment comprendre également que c’est dans les pays et les cultures qui pratiquent l’excision que que les taux de natalité sont les plus élevés et pour des raisons toutes autres à celles évoquées par lui ? Si c’est Élisabeth Lloyd qui a raison, comment interpréter cette exception de nature d’un clitoris qui ne servirait qu’à apporter du plaisir ?
2019. La médecine occidentale est née il y a vingt-deux siècles, et nous ne savons toujours rien de définitif concernant cet organe, si ce n’est qu’il permet à toutes les femmes, de tous les âges, de se mettre en joie.
Espérons que le point de vue de Roy Levin serve au moins à ce que tous les hommes se souviennent qu’il fait partie intégrante du rapport sexuel, avec ou sans motivation reproductive.
Références :
"Le clitoris - Une évaluation de sa fonction reproductrice pendant les années fertiles : pourquoi c’était, et c’est toujours négligé dans les récits de l’excitation sexuelle féminine " par Roy J. Levin, publié le 5 novembre 2019, par Clinical Anatomy.
Elisabeth Lloyd, The Case of the Female Orgasm, 2005.