Deborah de Robertis : la force femme

Le 01/10/2013

Deborah de Robertis pétille, bouscule et défend magistralement son double statut d’artiste et de femme. Plasticienne luxembourgeoise ayant pour outils la photographie et la vidéo, elle rudoie sans cesse la question des rapports dominés / dominants : l’homme et la femme, l’artiste et la galerie, la prostituée et son client.
Une série de photos la montre dévoilant son sexe nu, elle s’offre les cuisses très écartées - comme dans un rituel primitif - devant des galeries d’art contemporain, des musées, ou des lieux publics du monde politique. Là où de prime abord elle semble s’offrir, elle opère en réalité une transformation radicale et provocante, inversant la position de la muse, de la femme, de la putain, et devient maître d’oeuvre, dans tous les sens du terme.
Re-visitant aussi le lien de l’artiste soumis au regard de la galerie, et de la prostituée avec son client, elle vend ses photos à un prix inférieur si son sexe est caché par des pixels, que s’il ne l’est pas. Il faut payer plus, pour voir plus.

Dans son film « Cherry on top », l’artiste se mêle à des hommes qui, pour certains, enseignent l’art de séduire. Elle les reçoit un par un dans une chambre d’hôtel, installant une atmosphère conviviale (vin, cigarettes ...) ; elle filme la scène sur pied, puis donne à l’homme la caméra, pour le bercer dans l’illusion qu’il dirige la conversation, qu’il la domine lorsqu’elle s’offre nue à la caméra. Au montage, elle prend un contrôle qu’elle n’a en réalité jamais lâché, obligeant l’auteur des images à se retrouver simple pion dans son travail. N’est plus le réalisateur celui qui pensait l’être, c’est - comme précédemment - le sujet qui manipule, dans toute la force de sa nudité. D’elle, l’artiste Juan d’Oultremont dit : "Toujours dans un état de fébrilité extrême, dans ses films elle maîtrise les hasards et les rendez-vous et les transforme en rituels. Elle s’entoure de toutes sortes de compétences qui auront le loisir de penser que le travail est en train de lui échapper, et au dernier moment elle en fixera le cadre et l’imposera sous une forme que personne sauf elle n’aurait osé imaginer".

Actuellement en résidence à Paris, à la "Cité Internationale des Arts", elle devrait prochainement y proposer une performance. La force de cette artiste qui n’a pas encore 30 ans, nous invite à penser qu’il faut la surveiller de près.