La sexualité positive
Le 31/03/2022
La question complète que pose le docteur Iv Psalti, sexologue et thérapeute, est "Votre sexualité peut-elle contribuer à votre épanouissement personnel et affectif ?"
Poser la question ainsi c’est déjà y répondre. L’auteur, qui a déjà écrit un bon nombre de manuel à l’usage des couples perdus, des femmes démunies ou des hommes paralysés devant la fragilité de l’érection, connait son sujet. Ici, il dresse des portraits robots d’individus ou couples classés par niveau d’enthousiasme sexuel, couvrant l’ensemble du spectre, des asexuels aux sexophiles (malheureusement sans éviter de nombreux stéréotypes de genre, mais bon ...), ce qui laisse à chacun.e la possibilité de trouver sa place et de comprendre à quel point, dans le cas où il y a un ou des partenaires, l’harmonie sexuelle est fondamentale pour que le couple fonctionne. Comme les habitué.e.s de SecondSexe maitrisent assez bien la thématique, nous nous attarderons uniquement sur un sujet abordé sous un angle neuf : l’orgasme vaginal.
Pour le sexologue, "Une femme qui n’a pas beaucoup de plaisir, qui n’obtient pas d’orgasme, n’a aucun intérêt à répéter cette expérience, sauf celle qui la fait pour accomplir son devoir conjugal. Je ne suis pas d’accord avec ce que je lis, notamment dans certains magazines : « Si la femme n’a pas d’orgasme, ce n’est pas grave, tant qu’elle a du plaisir ». Pour les sexologues, l’anorgasmie est un trouble sexuel. Évidemment, pour une femme qui ne souffre pas de son anorgasmie, il ne s’agit pas d’un trouble. Pour la compétente sexuelle, il est important d’avoir des orgasmes, parce qu’elle stimule ainsi son système de récompense du cerveau, ce qui lui permet d’avoir envie de recommencer. C’est également important pour le partenaire : il prend du plaisir en voyant sa femme jouir. Et c’est vrai aussi dans l’autre sens : une femme compétente sexuelle veut également que son homme jouisse. Elle aussi aime voir les grimaces sur le visage de son compagnon lors de l’acmé."
Nous avons longtemps défendu l’idée qu’une femme ne devait pas se focaliser sur ce sacro-saint orgasme, mais chercher son plaisir, lequel, un jour, en retour, apporterait l’extase. Nous avons aussi défendu l’idée que muscler son muscle pubo-coccygien pour arriver à jouir était indéniablement efficace, mais ajoutait une corvée supplémentaire à la vie déjà bourrée d’injonctions des femmes, et trop, c’est trop. Pourtant, la question de la récompense est cruciale : c’est bien elle qui incite à recommencer (comme pour bien d’autres choses dans la vie).
Sans (trop) favoriser l’orgasme vaginal par rapport au clitoridien, le thérapeute, qui a fait faire une étude par ses étudiants à l’Université Libre de Bruxelles, avance que l’orgasme vaginal "est obtenu grâce à différents apprentissages, dont notamment l’érotisation du vagin par masturbation" et il peut se situer au niveau du point G ou vers le fond du vagin, en fonction de la façon dont les femmes se sont érotisées et masturbées.
Nous posons alors la question du sextoy : la plupart des femmes qui se masturbent ont recours à ces objets sexuels qui permettent de mieux se concentrer sur le sujet et d’arriver à l’orgasme (clitoridien ou vaginal) sans avoir un tennis elbow à force de penser en même temps à mille autres choses. Certaines utilisent des aides (Kegel, Luna Smart Bead ...) pour renforcer ce très miraculeux muscle pubo-coccygien. Dans les deux cas, la machine a pour avantage d’être un objet tiers qui permet une petite mise à distance, utile dans les cas où les masturbations sont encore vécues comme inavouables, y compris à soi-même. C’est pourtant cette même mise à distance qui, tenant les doigts éloignés de la chatte, ne permet pas d’en comprendre le fonctionnement, sentir la délicatesse de ces muqueuses si vivantes, dansantes à l’approche de l’orgasme. Il semble qu’il soit temps, pour celles qui résistent, de glisser un ou deux doigts dans leur vagin au moment d’un orgasme clitoridien afin d’en mieux comprendre les réactions. Et peut-être aussi faut-il cesser de voir le renforcement de ce muscle magique comme une corvée, mais comme un moyen de se découvrir pour obtenir un spectre plus large de jouissances ... à condition d’en avoir envie.
On laisse le mot de la fin à l’auteur du livre : on peut apprendre à devenir sexophile, savoir donner, recevoir et prendre du plaisir, à condition d’y voir comme une forme de "bonheur personnel". Ensuite, à chacun.e son chemin ...
La sexualité positive, l’épanouissement affectif et sexuel est à la portée de tous
Iv Psalti
Editions la Musardine
221 pages
8,50 € en édition de poche