Du porno bon pour les Oscars
Le 13/02/2018
Enfin du beau, du bon et du neuf dans le porno.
Depuis plus de dix ans une poignée de femmes dans le monde essaient de proposer un autre type de films pornographiques, dans une perspective féminine et féministe. Elles ont permis à celles que ne trouvent pas leur compte dans le porno classique, trop phallocentrique, de s’exciter autrement.
Mais Vex Ashley va plus loin. Avec une formation de photographe et un diplome d’art en poche, elle a réussi le pari qui semblait impossible d’une image totalement esthétique, cinématographique, et bandante à la fois. Son site, A four chambered heart, réinvente le genre et les classifications qui vont avec. Ici, pas de catégories de fellations, blondes, ou gros seins. Elles sont éliminées au profit de propositions plus poétiques comme "Apnée", "supplier", "entre deux" (catégories films), ou "transparence", "naïades", "oracle"(catégories photographies). Il n’y a pas non plus de spécification de genre (hommes / femmes) ou de sexualité (hétéros / homos). Pour Ashley, cette suppression de toute référence à des catégories classiques permet de s’affranchir des stéréotypes qui drivent aussi nos vies sexuelles, pour rendre à chacun une autonomie dans ses goûts.
Four Chambers (quatre chambres), est né en 2013 à son initiative, avec l’intention d’explorer l’esthétique et la pornographie comme un médium pour des idées neuves. A ses côtés, d’autres artistes, qui travaillent avec elle de façon collaborative, partagent sa philosophie et son goût de l’expérimentation. Ils et elles acceptent un financement des films exclusivement via le crowdfunding, sans chercher de rentabilité. "Nous voulons simplement explorer le potentiel de ce que le porno peut dire et faire", dit la réalisatrice, fascinée par l’aspect mystique de la sexualité, et inspirée par Roland Barthes, Jorge Luis Borges, Nick Cave, ou Louise Bourgeois.
Mêlant l’érotisme à l’explicite, ses films mixent chairs émouvantes, murmures et frissons crédibles (bien qu’ancienne photographe, elle attache une attention très particulière au son), peut-être parce qu’elle offre une grande liberté aux acteurs, qui n’ont ni scénario ni dialogues ou positions imposées, mais quelques références artistiques et la possibilité d’intervenir sur le montage final.
Grâce à l’esthétique défendue, la publication des photos sur les réseaux sociaux forme la base du trafic du site, tandis que l’engouement des médias et le bouche à oreille font le reste. Il faut souhaiter que cela dure, tant sa proposition en termes esthétiques et idéologiques est louable et admirable.