Les hommes consomment
Le 29/03/2018
Cela parait paradoxal, mais les plus gros consommateurs de sex-toys sont les hommes et c’est un sujet tabou pour eux comme pour les médias. Bien que 70% des achats sont faits par eux, on ne parle que de l’usage grandissant qu’en font les femmes, passant sous silence les usages de la grande majorité des usagers.
Deux points prévalent.
Tout d’abord, alors que l’histoire des sex-toys pour femmes est complexe (d’abord vendus à la fin du XIXe siècle pour « soigner l’hystérie », puis passés sous silence lorsqu’il est devenu clair qu’ils servaient à obtenir un orgasme, ils sont ré-apparus publiquement avec la série « Sex and the City », et ont encore un peu de mal à s’affranchir de l’image négative d’objet masturbatoire pour celles qui n’ont pas de partenaires). Celle des sex-toys pour hommes est linéaire.
Elle a commencé bien plus tard. Si les godemichés remontent à la préhistoire, les premiers sex-toys pour hommes - des anneaux péniens - datent du XIIIe siècle. Ils se sont surtout popularisés en Europe au XVIIe siècle. Puis, vient le scandale du premier livre du Marquis de Sade, Justine ou les malheurs de la vertu, publié en 1791, qui fait la notoriété des objets sexuels en tous genres.
Le premier sex-shop date de 1962. Il a été crée en Allemagne par une femme, à destination des hommes. Dès le début des années 70, il y en avait dans toutes les grandes villes françaises et notamment à Paris, à Pigalle et rue St-Denis. Ils ont rapidement été plongés dans l’opprobre et les hommes ont pris l’habitude d’y aller en rasant les murs, de même que les vendeurs ont avant dû apprendre à respecter l’anonymat des clients. C’est cette même pré-occupation d’anonymat qui se retrouve aujourd’hui sur Internet. Comme les médias ne sont pas aux mains des femmes, le sujet de la consommation masculine est occulté, au profit de l’usage nouveau qu’en ferait les femmes.
Ensuite, si les hommes ont acheté beaucoup de poupées gonflables et autres objets enrichissant leurs masturbations, ils achètent aussi des objets au bénéfice du couple, soit pour améliorer leurs érections, soit pour jouer à deux, y compris avec des vibromasseurs (en 1921, la première publicité pour sex-toys féminins,publiée dans le magazine américain Hearts, s’adressait aux hommes, leur recommandant d’acheter à leurs femmes un vibromasseur pour Noël). C’est peut-être ce qui explique qu’aujourd’hui encore l’essentiel des achats passe par les hommes, généralement plus curieux ou plus à l’aise que les femmes dans l’inclusion de jouets dans les rapports sexuels, pour en conserver la dimension ludique.
Sans qu’on en parle, donc, ils achètent des flesh lights (sorte de canette de soda remplie de silicone avec généralement la forme d’une vulve ou d’un anus sur le dessus dans lesquels ils insèrent leur verge pour se masturber et dont les sensations sont parait-il inouïes), des oeufs (pour le même usage), des plugs anaux (pour la prostate ou non) ou des développeurs (pour gorger le pénis de sang et aider l’érection). Aucune étude, à notre connaissance, ne fait la part des achats en fonction des préférences sexuelles (hétéro, homo, bi ...). Une étude anglaise publiée par le magazine Dazed & Confused montre que chez nos voisins, 66% des achats faits par les hommes sont pour un usage homo, contre 44% pour les hétéros. Ces chiffres, déclaratifs, montrent probablement aussi que les homosexuels sont plus à l’aise pour en parler que les hétéros. En attendant, les marques ciblent les gays dont le pouvoir d’achat est généralement bon et qui ne craignent le jugement de personne dans leurs achats.
En France, les chiffres montrent aujourd’hui que les principaux acheteurs de sex-toys, hommes et femmes confondus, ont entre 25 et 35 ans. Tout bouge, tout change et qui sait si bientôt les femmes ne se saisiront pas bientôt massivement de ce marché, pour leurs partenaires tout autant que pour elles ...